Brésil: Manaus, en Amazonie, plongée dans le chaos avec le coronavirus

« On se croirait dans un film d’horreur », lance le maire de Manaus, métropole amazonienne du nord du Brésil submergée par la lame de fond de la pandémie de coronavirus.

Hôpitaux saturés, cadavres entassés dans des camions frigorifiques, fosses communes dans les cimetières: la capitale de l’Etat d’Amazonas est plongée dans le chaos.

Les 50 lits de soins intensifs de Manaus — un chiffre dérisoire pour cette ville de 1,7 million d’habitants — sont déjà occupés alors que le Brésil n’a pas encore atteint le pic de la pandémie, attendu en mai, voire en juin.

« On ne peut plus parler d’état d’urgence, c’est un état de calamité absolue », insiste le maire Arthur Virgilio Neto auprès de l’AFP.

En temps normal, entre 20 et 30 personnes meurent chaque jour à Manaus, une ville étendue dont plusieurs centaines de milliers d’habitants vivent dans des habitations précaires sur pilotis au bord de l’Amazone.

Mais le nombre de décès a explosé à cause de la pandémie, à raison de plus de 100 par jour, selon la mairie. Le taux de mortalité est le plus haut des 27 capitales d’Etats du Brésil.

« Beaucoup de gens meurent chez eux, certains n’ont pas pu bénéficier d’une assistance médicale », déplore le maire.

– Embouteillages de corbillards –

L’Etat d’Amazonas, gigantesque territoire d’1,5 million de kilomètres carrés, près de trois fois la France métropolitaine, est le cinquième le plus touché du Brésil, avec 2.479 cas confirmés et 207 décès selon le dernier bilan officiel.

Aux abords des hôpitaux, les familles ont toutes les peines du monde à retirer les corps des défunts.

« Personne n’est encore venu me donner une réponse et je ne sais pas comment je vais faire pour enterrer ma grand-mère », raconte à l’AFP Rita Alencar.

Au cimetière public de Parque Taruma, des fosses communes ont été creusées pour inhumer les victimes de Covid-19.

La mairie a fixé à cinq le nombre maximum de personnes autorisées à assister aux obsèques.

Des vidéos circulant sur les réseaux sociaux montrent des embouteillages de corbillards attendant leur tour pour entrer dans le cimetière.

« Plusieurs fossoyeurs sont tombés malades et certains sont même morts du coronavirus », révèle le maire, qui a réclamé des fonds supplémentaires au gouvernement fédéral. Les besoins sont tels qu’il envisage même de lancer un appel pour obtenir de l’aide d’autres pays.

Un hôpital de campagne bâti par la mairie a été inauguré la semaine dernière, un autre destiné aux populations indigènes doit être construit prochainement avec des fonds fédéraux et des médecins de tout le pays ont été appelés en renfort.

Bernardo Albuquerque, spécialiste des maladies infectieuses à l’Université d’Amazonas (UFAM), juge la situation « extrêmement préoccupante » en raison de l' »incapacité du système de santé » à faire face à l’afflux de patients en état grave.

Outre les lits en soins intensifs, les hôpitaux manquent aussi cruellement d’équipements de protection, de médicaments et d’appareils de radiographie.

– Les indigènes en danger –

Autre problème de taille: le système de santé de l’Etat d’Amazonas est très centralisé, avec l’ensemble des unités de soins intensifs à Manaus, qui concentre également 80% des médecins habilités à traiter des patients atteints du virus.

Cela oblige les malades d’autres localités à se faire soigner dans la capitale, certains devant endurer de longues journées de voyage en bateau.

« La plupart des villages ne sont reliés à Manaus que par voie fluviale, les liaisons aériennes sont très limitées », explique Bernardo Albuquerque.

« Quand le patient parvient à arriver en vie, il se trouve souvent dans un état déplorable, sans aucune garantie de pouvoir être soigné. C’est une situation dramatique », souligne le maire.

La situation est encore plus préoccupante pour les peuples indigènes, particulièrement vulnérables aux virus venus de l’extérieur.

Les maladies amenées par les colonisateurs européens ont décimé près de 95% des autochtones d’Amérique.

Trois indigènes brésiliens sont déjà morts du Covid-19 et près de la moitié des 31 cas confirmés se trouvent actuellement à Manaus.

Le premier procès d’exactions du régime syrien s’est ouvert en Allemagne

Le procès de deux membres présumés des services de renseignement syriens, le premier au monde des exactions imputées au régime de Bachar al-Assad, s’est ouvert jeudi matin devant la justice allemande.

Le principal suspect, Anwar Raslan, 57 ans, portant moustache et lunettes, est présenté comme un ancien colonel de la Sûreté d’Etat. Il est poursuivi pour crime contre l’humanité.

La justice lui reproche d’être responsable de la mort de 58 personnes, de la torture d’au moins 4.000 autres, d’un viol et d’un sévice sexuel aggravé entre le 29 avril 2011 et 7 septembre 2012 dans le centre de détention d’Al-Khatib à Damas, dont il avait la charge.

Également dans le box des accusés à Coblence, Eyad al-Gharib, 43 ans, le visage en partie couvert à l’audience par un masque, comparaît pour complicité de crime contre l’humanité pour avoir participé à l’arrestation de manifestants emmenés dans cette prison, entre les 1er septembre et 31 octobre 2011.

– Sous haute sécurité –

Les deux hommes, en détention provisoire depuis leur arrestation le 12 février 2019, avaient fui leur pays avant de rejoindre l’Allemagne où ils ont demandé l’asile comme des centaines de milliers de Syriens depuis neuf ans.

Anwar Raslan affirme avoir fait défection fin 2012 et, selon plusieurs médias, avoir rejoint les rangs de l’opposition en exil avant son arrivée en Allemagne le 26 juillet 2014. Il encourt la prison à perpétuité.

Le procès, placé sous haute sécurité et qui se tiendra au moins jusqu’à la mi-août devant le tribunal de grande instance de Coblence, constitue « un pas important, c’est le début d’un examen des crimes (du régime syrien) devant une haute Cour allemande », affirme à l’AFP Wolfgang Kaleck, secrétaire général de l’ONG allemande ECCHR, qui a notamment apporté son soutien à 16 victimes rescapées dont certaines se sont constituées parties civiles.

Pour juger les deux Syriens, l’Allemagne applique le principe juridique de la compétence universelle qui permet à un Etat de poursuivre les auteurs de crimes quels que soit leur nationalité et l’endroit où ils ont été commis.

C’est actuellement la seule possibilité de juger les exactions perpétrées en Syrie car la perspective d’une saisine de la Cour pénale internationale est rendue impossible par les veto de la Russie et de la Chine, selon des ONG, saluant la tenue de ce procès.

Ce procès devrait « servir d’avertissement fort pour ceux qui commettent actuellement des abus en Syrie: personne n’est au dessus de la justice », a souligné Human Rights Watch (HRW). Amnesty International juge que c’est une « étape majeure dans la lutte contre l’impunité liée aux atteintes aux droits de l’Homme gravissimes commises en Syrie ».

Les enquêteurs se sont notamment appuyés sur les témoignages des victimes qui ont survécu aux conditions de détention « inhumaines et dégradantes », selon la justice, et sont parvenues à rejoindre l’Europe.

Quelques photos parmi les dizaines de milliers prises par un ancien photographe de la police militaire syrienne, exfiltré sous le pseudonyme de « César », et montrant des corps torturés et suppliciés, devraient être présentées au cours du procès où témoins et victimes syriennes se succèderont pour témoigner.

– Sévices brutaux –

Dans la prison d’Al-Khatib dite aussi de la division 251, les détenus, qui pour beaucoup avaient participé aux manifestations réclamant liberté et démocratie en Syrie dans le cadre du Printemps arabe à partir de mars 2011, ont reçu « des coups de poing, bâton, câble, fouet » et subi « des électrochocs », selon le parquet.

Ces « sévices brutaux psychiques et physiques » visaient à extorquer « des aveux et des informations sur l’opposition », précise l’acte d’accusation.

On ne parle « pas d’un quelconque gardien de prison », rétorque M. Kaleck, « mais de quelqu’un qui selon le parquet a eu une fonction de direction » au sein de l’appareil d’Etat syrien.

Les avocats des deux accusés n’ont pas voulu s’exprimer avant le procès.

En revanche, Bachar al-Assad, interrogé en novembre 2019 par la chaîne russe proche du Kremlin RT sur la procédure contre Anwar Raslan, avait nié toute pratique de la torture.

Pourtant, selon l’Observatoire syrien des droits de l’homme (OSDH), au moins 60.000 personnes sont mortes sous la torture ou à cause des terribles conditions de détention dans les prisons du régime.

« 24 heures en quête d’eau » au Mexique

Au Mexique, l’eau est une denrée rare. La saison des pluies n’y dure que de mai à septembre.

Les deux tiers de son territoire sont considérés comme arides ou semi-arides avec des précipitations annuelles inférieures à 500 mm. Dans le tiers sud, moins peuplé et plus humide, elles atteignent une moyenne de 2.000 mm.

Pourtant, dans ce pays de 120 millions d’habitants, grand comme quatre fois la France, obnubilé par ses problèmes économiques, le trafic de drogue, la violence, la pollution et les tremblements de terre, la quête de l’eau n’apparaît pas comme une priorité des dirigeants.

Dans ce contexte, l’AFP a mobilisé plusieurs de ses photographes et vidéastes pendant 24 heures afin de montrer comment des Mexicains vivent au quotidien ce manque d’eau.

Entretiens, photos et vidéos ont été réalisés au début de l’épidémie de Covid-19 au Mexique.

– « L’eau a le goût de la terre » –

A Juanacatlan, dans l’Etat de Jalisco, l’eau n’est pas potable. Elle arrive dans les maisons par des tuyaux tirés depuis le fleuve Santiago. Pour Rodrigo Saldaña, 65 ans, qui se bat pour une eau potable dans sa région, le gouvernement ne fait rien pour la rendre propre à la consommation.

« Boire de l’eau courante ? C’est risqué ici », confie Rodrigo à l’AFP.

« Il y a quelques années, un garçon du coin, nommé Miguel Lopez Rocha, est tombé dans le canal de l’Ahogado en essayant de récupérer son ballon. Il est mort empoisonné. Quiconque avale l’eau de cette rivière s’expose à la mort », prévient-il.

Virginia Lozano Romo, 51 ans, vit depuis neuf ans dans le quartier Esperanza de la localité de Tonala, également dans le Jalisco. Elle ne sait pas ce qu’est vivre avec de l’eau courante et n’a jamais bu d’eau minérale.

« Ici, l’eau a le goût de la terre », dit-elle.

« Ma fille et moi nous transportons de l’eau chaque jour du puits. Et nous savons qu’elle est contaminée, qu’elle rend les enfants malades », déplore-t-elle.

– La couleur d’un mauvais café –

Dans le même Etat coule la source de Mintzita, qui approvisionne la ville de Morelia. Une grande usine à papier fait vivre ses habitants. Ici, en raison des déchets qu’elle déverse dans le conduit qui relie la source à la ville, l’eau, constate le photographe, a une forte odeur et la couleur d’un mauvais café.

Mais, à Ciudad Juarez, Chihuaha, à quelques enjambées du mur de la frontière sud des Etats-Unis, l’eau a le goût du sel. Lorsqu’elle coule. Sinon, pour Fabiola, mère de deux jeunes enfants, c’est plus compliqué.

« Pour boire, nous avons deux bidons de 20 litres que le gouvernement nous fournit. Parfois, nous allons nous-mêmes chez le fournisseur. Cela nous coûte 22 pesos (environ 1 dollar). Parfois, un petit camion passe. Là, c’est 15 pesos (environ 70 cents) », explique-t-elle.

« Depuis que le gouvernement a installé l’eau ici, il y a 15 ans, le problème existe », observe la jeune femme. « Ils ont toujours su que cette eau ne pouvait pas être consommée et ils ne font rien ».

« Des fois, il faut des bidons pleins d’eau pour pouvoir laver la vaisselle, se baigner, on ne peut pas laver les vêtements car on en consomme beaucoup. Et j’ai essayé une fois de prendre un petit verre du robinet. C’est mauvais. Du sel pur. Imbuvable », dit-elle.

Selon elle, « lorsque l’eau sort, elle est noire, avec beaucoup de terre, une couleur de fer rouillé. Il faut attendre trois ou quatre heures avant de pouvoir commencer à l’utiliser ».

– Système D –

Parfois, il faut aussi recourir au système D. C’est le cas de Salomé Moreno, 47 ans, du quartier de Lazaro Cardenas à Tijuana, qui vit sans eau dans sa maison depuis 26 ans et ne sait pas pour quelle raison.

Elle montre au photographe de l’AFP le tuyau qu’elle a bricolé et qui part d’une habitation voisine de la sienne. « J’achète l’eau à un voisin. Lui en a. Cela me coûte très cher », déplore-t-elle.

María de la Luz Alonso, 53 ans, vit dans le même quartier. Elle a disposé des bassines d’eau sur une table pliante. « Je n’aime pas vivre comme ça, mais on s’adapte à tout, je suis ici depuis 3 ans. Moi aussi, j’ai mon tuyau qui vient de chez un voisin. C’est un tuyau long de 100 mètres ».

Mercedes Bocanegra, 54 ans, vit à San Juan Cadereyta, une ville de l’Etat de Nuevo Leon. Face au niveau de la rivière qui baisse, elle se lamente. « Il n’y a plus d’eau pour irriguer la terre. Il ne pleut plus. La sécheresse est terrible cette année ».

Le Vietnam commence à sortir du confinement, fort de son succès apparent face au coronavirus

Moins de 300 cas et zéro décès recensés: le Vietnam semble réussir à juguler la pandémie de coronavirus grâce à une politique stricte de quarantaine et de suivi des personnes infectées. Fort de ce succès apparent, le pays commence à sortir du confinement.

Si les rassemblements restent interdits, le port du masque et la distanciation sociale encouragés, le régime communiste autorise certains commerces à rouvrir à partir de jeudi notamment à Hanoï et Ho Chi Minh-Ville.

Dès les premières heures de la matinée, quelques cafés de la capitale ont redémarré timidement leur activité, stoppée nette depuis plusieurs semaines, ont constaté des journalistes de l’AFP.

Cet assouplissement intervient alors que le pays semble contrôler à ce jour la situation.

Depuis la détection des premiers cas en janvier, seules 268 contaminations au covid-2019 ont été signalées, sans entraîner de décès. Aucune nouvelle infection n’a été recensée depuis une semaine.

Le nombre de personnes testées reste certes faible (un peu plus de 180.000 sur une population de 96 millions d’habitants).

Et quiconque oserait remettre en cause les chiffres officiels s’exposerait à des sanctions du gouvernement, très attentif à ce que sa gestion de la crise sanitaire ne soit pas remise en cause.

– Camps de quarantaine –

Mais les experts estiment que la tendance est positive et des représentants de l’Organisation mondiale de la santé (OMS) ont à plusieurs reprises mis en avant la rapidité avec laquelle Hanoï avait réagi.

Dès les premiers jours de février, le Vietnam a suspendu tous ses vols vers la Chine et verrouillé quasi-totalement sa frontière terrestre, longue de 1.300 kilomètres, avec la République populaire.

Les écoles n’ont pas rouvert après les cérémonies du Têt, le Nouvel An vietnamien, fin janvier.

Et des villages agricoles et leurs 10.000 habitants ont été verrouillés pour trois semaines alors qu’il n’y avait qu’une douzaine de cas confirmés sur l’ensemble du territoire.

Par la suite, « plus de 80.000 personnes se sont retrouvées en quarantaine au même moment » à travers tout le pays dans des camps gardés par l’armée, a relevé Takeshi Kasai, directeur régional de l’OMS pour la région Pacifique occidental. « C’est la raison pour laquelle ils ont pu continuer à maintenir un petit nombre » d’infections.

Beaucoup de Vietnamiens, mais aussi d’étrangers, se sont ainsi retrouvés dans ces centres aux allures militaires, comme Vu Thi Nhung et son fils qui y ont passé deux semaines à leur retour d’Allemagne en mars.

Ils étaient obligés de dormir sur des lits superposés sans matelas, et trois repas quotidiens étaient déposés devant leur chambre par des soldats, racontent-ils à l’AFP.

– « Combattre l’ennemi » –

« On ne peut pas comparer cela à la maison mais vu la situation économique dans laquelle le pays se retouve à cause de cette épidémie, cela a dépassé mes attentes », relève Vu Thi Nhun.

N’ayant pas les moyens de lancer une campagne de tests à grande échelle comme la Corée du Sud, les autorités ont aussi misé sur l’isolement des personnes infectées. Une véritable traque s’est mise en place pour débusquer les personnes avec lesquelles elles avaient été en contact.

A Hanoï, Nguyen Trinh Thang, vétéran de la guerre du Vietnam, a ainsi été recruté pour cibler tout cas suspect. Il peut s’appuyer sur les réseaux d’habitants utilisés depuis des décennies par le régime communiste pour relayer l’action du parti dans les quartiers.

« Nous allons dans toutes les allées, on frappe à toutes les portes », explique-t-il à l’AFP. « Combattre l’épidémie, c’est combattre l’ennemi », ajoute-t-il en reprenant la devise du gouvernement.

Une stratégie plutôt bien accueillie par les Vietnamiens, habitués à l’omniprésence du parti, comme en attestent les messages positifs sur les réseaux sociaux.

Ultime pied de nez du Vietnam, le régime mise désormais sur la « diplomatie des masques » pour renforcer sa position à l’international. Le pays a fait don ces deux derniers mois d’au moins 1,5 million de masques à plusieurs pays d’Europe de l’Ouest et aux Etats-Unis, qui en manquent cruellement.

La justice allemande se penche pour la première fois sur des exactions en Syrie

Deux membres présumés des services de renseignement syriens, dont un haut gradé, comparaissent à partir de jeudi devant la justice allemande pour le premier procès au monde des exactions imputées au régime de Bachar al-Assad.

Le principal suspect, Anwar Raslan, 57 ans, présenté comme un ancien colonel de la Sûreté d’Etat, est poursuivi pour crime contre l’humanité.

La justice lui reproche d’être responsable de la mort de 58 personnes, de la torture d’au moins 4.000 autres, d’un viol et d’un sévice sexuel aggravé entre le 29 avril 2011 et 7 septembre 2012 dans le centre de détention d’Al-Khatib à Damas, dont il avait la charge.

Également dans le box des accusés, Eyad al-Gharib, 43 ans, comparaît pour complicité de crime contre l’humanité pour avoir participé à l’arrestation de manifestants emmenés dans cette prison, entre les 1er septembre et 31 octobre 2011.

Les deux hommes, en détention provisoire depuis leur arrestation le 12 février 2019, avaient fui leur pays avant de rejoindre l’Allemagne où ils ont demandé l’asile comme des centaines de milliers de Syriens depuis neuf ans.

Anwar Raslan affirme avoir fait défection fin 2012 et, selon plusieurs médias, avoir rejoint les rangs de l’opposition en exil avant son arrivée en Allemagne le 26 juillet 2014. Il encourt la prison à perpétuité.

– « Pas important » –

Le procès, placé sous haute sécurité et qui se tiendra au moins jusqu’à la mi-août devant le tribunal de grande instance de Coblence, constitue « un pas important, c’est le début d’un examen des crimes (du régime syrien) devant une haute Cour allemande », affirme à l’AFP Wolfgang Kaleck, secrétaire général de l’ONG allemande ECCHR, qui a notamment apporté son soutien à 16 victimes rescapées dont certaines se sont constituées parties civiles.

Pour juger les deux Syriens, l’Allemagne applique le principe juridique de la compétence universelle qui permet à un Etat de poursuivre les auteurs de crimes quels que soit leur nationalité et l’endroit où ils ont été commis.

C’est actuellement la seule possibilité de juger les exactions perpétrées en Syrie car la perspective d’une saisine de la Cour pénale internationale est rendue impossible par les veto de la Russie et de la Chine, selon des ONG.

Les enquêteurs se sont notamment appuyés sur les témoignages des victimes qui ont survécu aux conditions de détention « inhumaines et dégradantes », selon la justice, et sont parvenues à rejoindre l’Europe.

– « Electrochocs » –

Dans la prison d’Al-Khatib dite aussi de la division 251, les détenus, qui pour beaucoup avaient participé aux manifestations réclamant liberté et démocratie en Syrie dans le cadre du Printemps arabe à partir de mars 2011, ont reçu « des coups de poing, bâton, câble, fouet » et subi « des électrochocs », selon le parquet.

Certains ont été pendus par les poignets « de manière à ce que seules les pointes des pieds touchent encore le sol » et « ont continué à être battus dans cette position », poursuit-il, évoquant aussi « des privations de sommeil pendant plusieurs jours ».

Ces « sévices brutaux psychiques et physiques » visaient à extorquer « des aveux et des informations sur l’opposition », précise l’acte d’accusation.

On ne parle « pas d’un quelconque gardien de prison », rétorque M. Kaleck, « mais de quelqu’un qui selon le parquet a eu une fonction de direction » au sein de l’appareil d’Etat syrien.

Les avocats des deux accusés n’ont pas voulu s’exprimer avant le procès.

En revanche, Bachar al-Assad, interrogé en novembre 2019 par la chaîne russe proche du Kremlin RT sur la procédure contre Anwar Raslan, avait nié toute pratique de la torture.

« Nous n’avons jamais considéré que la torture pouvait améliorer la situation de l’Etat, c’est aussi simple que cela », avait affirmé le président syrien qui dirige le pays d’une main de fer depuis vingt ans.

Pourtant, selon l’Observatoire syrien des droits de l’homme (OSDH), au moins 60.000 personnes sont mortes sous la torture ou à cause des terribles conditions de détention dans les prisons du régime.

Coronavirus en Afrique: la télévision comme tableau noir pour élèves et étudiants

« Ecole à la maison », « Salle des profs », « L’école à la télé »… De nombreux Etats africains ou des chaînes privées ont lancé des programmes de télé-enseignement pour tenter de compenser la fermeture des établissements scolaires et universitaires. Mais ce n’est pas la solution miracle.

« C’est pour éviter que le Covid-19 gagne là où ça fera le plus mal, dans le domaine du savoir. Que les enfants ne désapprennent pas même s’ils restent à la maison », affirme à l’AFP Massamba Guèye, enseignant-chercheur au Sénégal, où la télévision Futurs Médias (TFM, privée), propriété du chanteur Youssou Ndour, dispense trois fois par jour des cours à toutes les classes, y compris l’enseignement professionnel.

« La reprise de l’école (…) n’est plus à l’ordre du jour. Il faut sauver l’école car, probablement, une menace d’année blanche plane », constate l’Association générale des élèves et étudiants de Côte d’Ivoire (Ageeci).

Au Burkina Faso, la télévision privée Burkinainfo diffuse quatre fois par jour des cours destinés aux élèves en classe d’examen (3e et terminale).

« Nous enregistrons les enseignements, que nous diffusons sur la télévision. Essentiellement les matières de base: mathématiques, physique-chimie, philosophie et français », explique le directeur de la chaîne Ismaël Ouédraogo. « Les cours sont dispensés par des enseignants expérimentés, qui soutiennent bénévolement l’initiative de la télévision”, soutient-il.

En Côte d’Ivoire, une start-up propose des cours avec des sms. Gratuit au début mais payant ensuite….

Plusieurs instituts et universités africaines privées explorent l’enseignement à distance avec internet.

« Nous avons prévu de finir l’année scolaire fin mai », explique au Burkina le président du conseil d’administration de l’Institut africain de management (IAM), Amed Moussa Diallo, qui a mis en place des cours en ligne.

Toutefois, cette méthode se heurte à plusieurs écueils: la faible couverture dans certaines régions d’Afrique (zones rurales), ou son prix, car dans de nombreux pays la plupart des étudiants n’ont pas les moyens de se connecter longtemps.

« La plupart des étudiants n’ont pas accès à internet d’autant qu’on a demandé à beaucoup d’entre eux de rentrer dans leurs foyers souvent dans des endroits reculés de l’Ouganda », affirme Henry Tumwiine, professeur à l’université Mountain of the Moon University de Fortportal (Ouest de l’Ouganda).

« En Afrique subsaharienne, 89% des apprenants n’ont pas accès aux ordinateurs familiaux et 82% n’ont pas internet », souligne l’Unesco dans un communiqué, dénonçant une « fracture numérique préoccupante dans l’enseignement à distance ».

« En outre, alors que les téléphones mobiles peuvent permettre aux apprenants d’accéder à l’information, de se connecter entre eux et avec leurs enseignants, environ 56 millions d’apprenants vivent en des lieux non desservis par les réseaux mobiles, dont près de la moitié en Afrique subsaharienne », ajoute l’Unesco.

« Je n’ai pas de quoi me payer un ordinateur donc je manque les cours en ligne. On va attendre la réouverture de l’université », affirme Alexander Mubiru, 29 ans, étudiant à l’université public de Makerere de Kampala.

La télévision n’est pour autant pas le remède miracle, faute d’interactivité entre professeurs et élèves: pas de question possible, pas d’observation du professeur pour voir si les élèves ont bien compris…

Il aurait fallu coordonner le programme avec des écoles ou des professeurs pouvant intervenir avec les élèves, comme pour les cours par internet, estiment certains parents d’élèves.

– Pas d’électricité ou de télé –

« Avec les cours à la maison, les élèves doivent d’abord s’habituer à s’asseoir et être devant leurs ordinateurs. Ils doivent adopter une discipline », estime Makini Tchameni, directrice de l’African American Academy, spécialisé dans les cours à distance au Burkina.

L’Ageeci s’interroge sur la possibilité de proposer « le quantum horaire (1.300 heures pour l’année) » et s’inquiète aussi pour les élèves « qui ne comprennent pas les cours (…)Pourront-ils maitriser le téléenseignement, surtout pour ceux qui sont dans les bas-quartiers où il n’y a parfois ni électricité, ni télévision, ni radio ou internet? »

« Depuis une semaine, la ville est privée d’électricité. Les élèves passent le temps dans les champs pour gagner de l’argent », témoigne un fonctionnaire de Mozogo, ville enclavée de l’Extrême-Nord du Cameroun.

« Les enfants sont désemparés. Ce n’est pas tout le monde qui a un téléviseur. Nous sommes inquiets parce que nos enfants n’ont pas la même possibilité de suivre les cours à la radio et à la télé », explique Gil Mahama, parent de huit enfants à Mozogo.

Assidu devant la télé dans le salon familial au Burkina, Khalil Nonguierma, élève de terminale, se réjouit de l’initiative qui permet de « garder un contact avec l’école » mais s’inquiète du « manque d’interactivité avec l’enseignant qui se contente de faire un cours magistral ou de traiter des exercices ». « Si on comprend, c’est bien mais si on ne comprend pas, on n’arrive plus à suivre ».

Nigeria: des centaines d’enfants des rues évacués de Kano pour éviter la propagation du virus

Des centaines de garçons font la queue en attendant de monter dans des bus qui les emmeneront loin de Kano. Après avoir noté leur nom et pris leur température, la grande ville du nord du Nigeria évacue ces enfants des rues pour se protéger du coronavirus.

La plupart d’entre eux sont des élèves d’écoles coraniques controversées que l’on voit généralement mendier dans les rues dans le nord majoritairement musulman du pays.

Pour freiner la propagation du coronavirus, les autorités locales ont décidé d’évacuer quelque 250.000 enfants de la ville de quatre millions d’habitants, pour les renvoyer dans leurs villages.

« Pour l’instant, nous allons évacuer 1.595 enfants », a déclaré à l’AFP Muhammad Sanusi Kiru, ministre de l’Education de Kano, alors que les premiers bus s’apprêtaient à partir mardi. « C’est un processus graduel, nous le faisons par phases, nous les récupérons petit à petit ».

Les rues de cette cité commerçante d’ordinaire bouillonnante d’activité – qui compte pour l’instant 73 cas officiellement confirmés de coronavirus et un décès – sont vides depuis le confinement décrété la semaine dernière.

Le gouvernement de Kano, qui estime le nombre d’enfants mendiants à plusieurs millions dans tout l’Etat, craint une propagation du virus qui pourrait s’avérer catastrophique dans une ville comme Kano, aux infrastructures de santé largement défaillantes.

– « Conditions désastreuses » –

Dans cette région, de nombreux parents envoient leurs fils dès l’âge de six ans apprendre le Coran auprès de maitres religieux dans des écoles non agréées, appelées Almajiri.

Les cours sont gratuits, mais les enfants doivent se débrouiller seuls, généralement en mendiant ou en effectuant des petits boulots.

Ces écoles – qui font aussi office de « maisons de correction » pour les jeunes toxicomanes – ont fait scandale l’année dernière, lorsque plusieurs raids de la police dans des villes du nord ont mis à jour les conditions inhumaines dans lesquelles y vivaient nombre d’enfants et de jeunes hommes.

Certains ont été retrouvés enchaînés, des centaines vivaient entassés dans des pièces sales où la torture et le viol étaient généralisés.

Dans une lettre ouverte en mars, une ONG nigériane, Almajiri Child Right Initiative, demandait que les enfants qui le pouvaient soient ramenés chez eux, et que des aides alimentaires soient distribuées à ceux qui restaient.

« Les écoles officielles ont été suspendues partout dans le pays pour contrôler la propagation probable de la pandémie (…) mais aucune mesure similaire n’a été appliquée dans les écoles Almajiri », selon l’ONG.

Compte tenu des conditions « désastreuses » dans lesquelles ces enfants vivent, « nous pensons qu’il n’y a pas pire environnement » pour eux.

– « Volontaires » –

Kano imite ainsi les Etats voisins de Kaduna et Nasarawa, qui ont déjà évacué des grandes villes des centaines d’enfants, dans le cadre d’une résolution prise par 19 gouverneurs du nord, pour lutter contre la mendicité dans le contexte de crise sanitaire.

Selon les autorités de Kano, qui ont appelé les leaders religieux à évacuer leurs élèves via des messages diffusés à la radio, la première vague de 1.595 garçons part sur une base « volontaire ».

« Les enseignants qui ont amené ces enfants à Kano sont ceux qui nous appellent volontairement pour venir les chercher », assure le ministre Kiru. « Nous ne les obligeons pas à quitter l’Etat ».

Pour l’activiste Saminu Dala, les 250.000 jeunes mendiants identifiés jusque-là « ne représentent qu’une fraction de leur nombre réel ».

« Dans une situation d’urgence comme celle-ci, vous devez être sévère et utiliser la puissance régalienne pour évacuer ces enfants », de force si besoin, a-t-il dit à l’AFP.

En février, avant même que le coronavirus arrive dans la région, la mendicité de rue avait été interdite. La police chargée de faire appliquer la charia, la Hisbah, avait reçu l’ordre d’arrêter les religieux et les parents qui enfreignaient la nouvelle mesure.

Seuls 1.500 enfants avaient initialement regagné leurs foyers, mais au bout de quelques semaines, la répression s’était essoufflée.

Loin de leur terre, les Nubiens rêvent de redonner vie à leur langue

Nourrie aux récits de l’époque lointaine où la vie s’articulait autour du Nil, Fatma Addar, 23 ans, a grandi dans la culture nubienne de ses parents, sans jamais en parler la langue, aujourd’hui très peu usitée.

« On me demande souvent comment je peux être nubienne si je ne parle pas notre propre langue (…). Cela a toujours été un problème pour moi », déplore Mme Addar, arabophone d’éducation.

Cette habitante d’Assouan (sud) appartient à la principale minorité ethnique d’Egypte: les Nubiens, qui ont leurs racines dans le Sud du pays et le Nord du Soudan actuel.

Depuis les années 1960, les terres de l’ancienne Nubie sont en grande partie submergées par les eaux du lac Nasser, né de la construction du Haut barrage d’Assouan, projet monumental lancé par le président Gamal Abdel Nasser et inauguré en 1971.

En l’absence de chiffres officiels, les experts et associations nubiennes évaluent leur nombre entre trois à quatre millions de personnes aujourd’hui, sur plus de 100 millions d’Egyptiens.

A l’époque de la submersion, une part importante de la population d’alors –soit quelque dizaines de milliers de personnes, selon les associations– a dû quitter les rives fertiles du Nil pour les campagnes arides du Sud, ou les grandes villes, et s’assimiler progressivement au reste de la société… Jusqu’à en adopter la langue.

– « Marginalisation culturelle » –

Car si les programmes scolaires comprennent des langues étrangères, ni le nubien ni le berbère, langues minoritaires, ne sont enseignés dans les écoles égyptiennes.

Pour le chercheur Hussein Kobbara, 63 ans, cela participe « clairement de la marginalisation culturelle » des Nubiens.

« Cela fragilise notre identité », ajoute l’universitaire, lui-même d’origine nubienne.

Mme Addar, à l’instar de la plupart des Nubiens de sa génération, n’a été exposée à la langue de ses aïeux qu’à de rares occasions, notamment auprès des membres les plus âgés de la communauté, derniers gardiens de l’idiome ancestral.

« Notre intégration à la société arabophone a peu à peu éloigné le besoin de parler nubien », regrette la jeune femme.

Avec ses origines remontant à plusieurs milliers d’années, la langue nubienne se décline en deux dialectes, le kenzi et le fadidji, assez différents l’un de l’autre.

Transmise surtout oralement, elle est aujourd’hui transcrite dans un alphabet de 24 lettres proche du grec, mis au point par une équipe de chercheurs dans les années 1990.

Du fait de sa rareté, cette langue a été utilisée comme code militaire dans l’armée égyptienne durant la guerre de 1973 contre Israël.

– « Contes d’antan » –

Ces dernières années, la communauté nubienne a décidé de réinvestir son patrimoine linguistique en profitant notamment des nouvelles technologies.

« On filme des Nubiens âgés qui nous racontent les coutumes et légendes de leurs anciens villages, puis on en extrait des expressions », explique à l’AFP Hafsa Amberkab, une cheffe d’entreprise nubienne.

Cette initiative intitulée « Komma Waidi » (« Contes d’antan », en nubien), vise à documenter toute une tradition orale de récits et de fables.

Dans l’une des vidéos –dont certaines sont accessibles sur les réseaux sociaux–, on voit une femme âgée baigner un nouveau-né dans le Nil sept jours après sa naissance pour le bénir et le protéger, selon un vieux rituel de baptême nubien.

Depuis 2019, Mmes Amberkab et Addar travaillent également à un dictionnaire kenzi qui comprend 230 mots transcrits en alphabet arabe et traduits en arabe, anglais et espagnol.

– Application mobile –

En 2017, le développeur Momen Talouch a de son côté créé l’application mobile Nubi destinée à l’apprentissage des deux dialectes nubiens.

« Je ne les parle pas couramment moi-même car j’ai toujours vécu à Alexandrie », dans le nord de l’Egypte, affirme-t-il, tout en revendiquant son appartenance à la Nubie.

Dotée de 3.000 utilisateurs réguliers et téléchargée plus de 20.000 fois, l’application propose d’apprendre, avec des jeux, des chansons et des proverbes transcrits en alphabet nubien moderne et traduits en arabe.

Les chansons oscillent entre des airs gais, incontournables des mariages de la communauté, et des morceaux chargés de mélancolie.

« Mon fils, toi qui t’en vas rejoindre le village, pense à moi quand tu y seras et salue-le pour moi », raconte l’une d’elles.

Les Nubiens réclament de longue date un « droit de retour » et ont obtenu, en 2014, l’inscription de cette revendication dans la Constitution égyptienne.

Bien que le texte leur garantisse « un retour sous dix ans », aucune mesure concrète n’a pour l’heure été prise.

Au contraire, le territoire de l’ancienne Nubie qui n’a pas été inondé a progressivement été placé sous le contrôle de l’armée, dont le rôle est croissant dans l’économie égyptienne.

– Réparation partielle –

L’histoire récente des Nubiens est jalonnée de vagues successives de déplacements de population.

Les différentes étapes de la construction de l’ancien barrage (1902, 1912, 1933), édifié sous le protectorat britannique à la fin du XIXe siècle, ont donné lieu à de premières évacuations, culminant avec la construction du Haut barrage d’Assouan dans les années 1960.

En 2017, plusieurs sit-ins et marches « pour le retour » dans le sud ont abouti à l’arrestation d’une vingtaine de manifestants nubiens.

L’an dernier, le gouvernement a annoncé des mesures partielles de réparation prévoyant le dédommagement, par compensations financières ou attribution de logements sociaux, de quelques milliers de Nubiens.

Toutefois, aux yeux des militants de la cause nubienne, ces gestes ne peuvent remplacer leur droit au retour.

« Cela sera toujours notre rêve et nous devons maintenir notre langue en vie jusqu’à ce que l’on puisse se réinstaller sur nos terres », exhorte la cheffe d’entreprise Hafsa Amberkab.

« Sinon, ce sera un retour sans âme ».

Aux Etats-Unis, la Géorgie rouvre ses commerces malgré le coronavirus et les critiques

Le gouverneur de la Géorgie a autorisé certains pans de l’économie à rouvrir vendredi dans cet Etat du sud des Etats-Unis, une décision critiquée par des responsables locaux et même par Donald Trump, pour qui la mesure est précipitée en pleine pandémie de coronavirus.

Brian Kemp, un fervent partisan du président américain, a décidé de rouvrir certains commerces comme les salles de gym, les bowlings, les ateliers de tatouages, les salons de coiffure et de soins esthétiques ou les ongleries.

A partir de lundi, ce sera au tour des cinémas et des restaurants, qui devront imposer de strictes mesures de distance sanitaire et procéder à des nettoyages réguliers.

Le gouverneur républicain a cité « les données favorables et l’augmentation des tests » pour justifier sa décision, selon lui « approuvée par nos professionnels de la santé », alors que l’Etat compte près de 21.000 cas positifs au coronavirus et a enregistré plus de 850 décès.

Ces réouvertures sont « d’une précision chirurgicale, ciblées et méthodiques, en donnant la priorité à la santé des citoyens », a assuré M. Kemp.

Mais même Donald Trump, ardent partisan d’une réouverture au plus vite de l’économie, a dit mercredi être en « désaccord profond » avec le gouverneur, estimant que les commerces concernés ne faisaient pas partie de la première phase du plan préparé par la Maison Blanche pour relancer l’activité de la première puissance mondiale.

« C’est trop tôt, ils peuvent attendre encore un petit peu », a-t-il expliqué, tout en disant laisser M. Kemp libre de sa décision.

« Je lui conseillerais de ne pas faire ça », a renchéri l’épidémiologiste Anthony Fauci, conseiller de la Maison Blanche sur la pandémie.

Keisha Lance Bottoms, la maire démocrate d’Atlanta, capitale de l’Etat de Géorgie, a de son côté dénoncé une décision qu’elle juge précipitée et dangereuse.

« Je suis profondément inquiète, car on observe toujours une courbe ascendante » de la contamination dans l’Etat, a-t-elle dit sur CBSN.

« J’espère que le gouverneur a raison et que j’ai tort, parce que s’il se trompe, plus de gens vont mourir », a affirmé la maire.

– Responsabilité individuelle –

Brian Kemp a en revanche reçu l’appui d’une partie du patronat local, comme celui de Kay Kendrick, présidente de la Fédération de la cosmétologie et de la coiffure, qui compte 95.000 membres.

« Beaucoup d’entre eux sont des indépendants qui n’ont pas d’autres sources de revenus », a-t-elle dit dans un communiqué.

Pour Diane Fall, au contraire, il est trop tôt. « On dirait que le gouverneur nous fait une faveur, mais je préfère être en vie plutôt qu’ouvrir mon commerce », a dit cette propriétaire d’un salon de coiffure à Decatur, citée par le Wall Street Journal.

Le patron du département d’épidémiologie à l’Université d’Atlanta, José Cordero, rappelle que la propagation du virus est différente selon les Etats et que chacun doit étudier la situation sur le terrain, tout en respectant les consignes sanitaires.

« L’ouverture de ces commerces ne signifie pas qu’on a carte blanche », a-t-il dit à l’AFP.

« Nous devons tous garder à l’esprit notre responsabilité individuelle, si vous êtes malade, restez à la maison », a-t-il ajouté.

Donald Trump souhaite une relance rapide pour briser la spirale de la crise et du chômage – plus de 22 millions d’Américains ont perdu leur emploi depuis le début de l’épidémie. A travers le pays, les partisans du déconfinement demandent la fin des restrictions qui ont mis en sommeil le pays.

Plusieurs Etats républicains ont récemment desserré l’étau du confinement obligatoire. La Caroline du Sud et la Floride ont ainsi ouvert quelques plages au public, et préparent un redémarrage en plusieurs phases.

Coronavirus: la lutte sera longue, impatience aux Etats-Unis, timide déconfinement en Europe

La lutte contre le coronavirus sera longue, prévient l’OMS au moment où l’impatience grandit aux Etats-Unis et où l’Europe prépare son déconfinement, sur fond d’inquiétudes économiques.

« Ne vous y trompez pas : nous avons encore un long chemin à parcourir. Ce virus nous accompagnera pendant longtemps », a prévenu mercredi le directeur général de l’OMS, Tedros Adhanom Ghebreyesus depuis Genève.

Le patron de l’Organisation mondiale de la Santé (OMS) redoute tout particulièrement un relachement dans le combat mené contre ce nouveau virus, qui a déjà fait plus de 180.000 morts dans le monde depuis son apparition en Chine en décembre.

« L’un des plus grands dangers auxquels nous sommes confrontés aujourd’hui est la complaisance » face à la pandémie, a-t-il martelé, soulignant que « les premiers éléments indiquent que la majeure partie de la population mondiale reste susceptible » d’être contaminée.

Aux Etats-Unis, où les manifestations anticonfinement se poursuivent, les autorités ont recensé mercredi 1.738 décès dus au coronavirus en 24 heures, un bilan en baisse par rapport à la veille, selon le comptage de l’université Johns Hopkins qui fait référence.

Ce bilan journalier porte à 46.583 le nombre total de décès recensés depuis le début de la pandémie aux Etats-Unis, pays officiellement le plus endeuillé au monde par le Covid-19.

– « Redémarrer l’Amérique » –

En dépit de ces chiffres, et de la situation dramatique dans les hôpitaux de certaines régions particulièrement touchées, le président américain Donald Trump a jugé la semaine dernière qu’il était temps de faire « redémarrer l’Amérique ». Il a toutefois laissé chacun des gouverneurs prendre la décision selon la gravité de l’épidémie dans son Etat.

Certains ont rapidement commencé à relâcher les règles de distanciation. Dans les Etats encore sous ordre de confinement, des Américains multiplient depuis plusieurs jours les manifestations pour appeler à relancer l’économie.

Sur la même longueur d’onde, Donald Trump a signé mercredi un décret suspendant temporairement l’immigration aux Etats-Unis, qui ne délivreront plus de cartes vertes pendant deux mois, afin, dit-il, de protéger les salariés américains.

De l’autre côté de l’Atlantique, plusieurs pays européens se préparent à sortir progressivement du confinement que leurs populations sont contraintes de respecter depuis le mois dernier.

Et la tentation y est grande de relancer certaines activités économiques face au spectre de la récession.

Mais « aller trop vite serait une erreur », a estimé mardi la chancelière allemande Angela Merkel, dont le pays a décidé entre autres de rouvrir certaines grandes surfaces.

Berlin et dix des 16 Etats fédérés allemands ont décidé d’imposer le port du masque dans les transports publics. Bars, restaurants, lieux culturels, terrains de sports y demeurent fermés. Ecoles et lycées rouvriront progressivement.

– « Distanciation sociale » –

Outre l’Allemagne, l’Autriche, la Norvège ou le Danemark sont engagés sur la voie de l’assouplissement de leurs mesures de confinement, tout en conservant des mesures de « distanciation sociale ».

L’Italie, la France, la Suisse, la Finlande et la Roumanie préparent aussi un prudent déconfinement.

Le constructeur automobile Renault a commencé à relancer sa production en France, qui avait été interrompue le 16 mars.

Malgré des signes de décélération, le seuil des 112.000 morts a été dépassé sur le Vieux Continent. L’Italie (25.085 morts) et l’Espagne (21.717) sont les pays en Europe les plus atteints, suivis de la France (21.340) et du Royaume-Uni (18.100).

Alors que 759 décès étaient enregistrés en Grande-Bretagne au cours des dernières 24 heures, portant le bilan dans le pays à 18.000 morts, le chef des services sanitaires britanniques, Chris Whitty, a douché les espoirs de ceux qui espéraient que Londres allait suivre la tendance européenne à alléger dans les semaines à venir les mesures de confinement.

« A long terme, on s’en sortira (…) idéalement avec un vaccin très efficace (…) ou des médicaments très efficaces qui permettront aux gens de ne plus mourir de cette maladie, même s’il l’attrapent », a-t-il dit.

– Course au vaccin –

La course mondiale à l’élaboration d’un vaccin, à laquelle participent toutes les nations et tous les grands laboratoires et firmes pharmaceutiques, a été relancée mercredi avec le feu vert donné par l’autorité fédérale allemande chargée de la certification des vaccins à un essai clinique sur les humains par le laboratoire BioNTech, basé à Mayence, en lien avec le géant américain Pfizer.

Actuellement, cinq projets de vaccin dans le monde en sont aux essais sur des humains mais la mise au point d’une formule efficace et sûre ne devrait pas prendre moins de douze à 18 mois, estiment les experts.

En attendant ce vaccin, dont le monde entier voudra disposer en même temps et dont l’obtention risque de donner lieu à une compétition féroce, la pandémie va continuer à alimenter une crise économique mondiale aux répercussions inédites.

Dans un monde à l’arrêt, les dirigeants cherchent toujours à juguler les effets d’une crise économique que le Fonds monétaire international (FMI) et l’Organisation internationale du travail (OIT) décrivent comme la pire depuis 1945.

Les dirigeants européens se retrouvent jeudi devant leurs écrans, pour un sommet en visioconférence censé trouver les solutions pour sortir l’Union européenne de la récession, mais leurs profondes divisions risquent de les contraindre à reporter toute décision d’envergure.

La crise s’amplifie pourtant dans certains secteurs. Lù l’Organisation internationale de l’aviation civile (OACI) estime ainsi que le coronavirus pourrait réduire de 1,2 milliard le nombre de passagers dans le ciel d’ici septembre, comparé à une année normale.

La Corée du Sud a annoncé jeudi une contraction de 1,4% de son activté économique au premier trimestre par rapport à l’année précédente, et les autorités redoutent un nouveau ralentissement dans les mois qui viennent.

L’ONU s’est de son côté alarmée d’une « catastrophe humanitaire mondiale » : le nombre de personnes souffrant de famine risque de doubler pour atteindre « plus de 250 millions d’ici la fin de 2020 », selon elle.

La crainte d’une deuxième vague reste également très forte

Aux Etats-Unis, un haut responsable de la santé publique, Robert Redfield, a dit redouter pour l’hiver prochain un épisode « encore plus difficile que celui que nous venons de vivre », en raison d’une possible coïncidence avec la grippe saisonnière.

Berceau du coronavirus, parti de Wuhan fin 2019, la Chine craint aussi une deuxième vague épidémique. Dans le collimateur : les personnes venant de l’étranger. Face à cette menace, la métropole de Harbin, proche de la Russie, a renforcé mercredi ses mesures de restriction.

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