Alors que la République centrafricaine se prépare à élire un nouveau président le 28 décembre 2025, sept candidats ont été retenus par le Conseil constitutionnel pour briguer la magistrature suprême. Entre poids lourds de la scène politique, anciens Premiers ministres et figures émergentes du renouveau, le paysage électoral reflète un pays en quête de stabilité, de sécurité et de respiration démocratique. Voici les portraits de ceux qui ambitionnent de diriger la Centrafrique.
Faustin-Archange Touadéra : le président sortant en quête d’un troisième mandat
Figure centrale du paysage politique depuis près d’une décennie, Faustin-Archange Touadéra brigue un troisième mandat consécutif, rendu possible après la réforme constitutionnelle de 2023. Mathématicien de formation, ancien Premier ministre puis président depuis 2016, il a ancré son pouvoir autour d’un appareil d’État solide et d’une stratégie sécuritaire assumée.
Sa gouvernance, soutenue par des partenariats extérieurs très influents, a permis selon lui de poursuivre la « restauration de l’autorité de l’État ». Mais ses détracteurs pointent une centralisation du pouvoir, des atteintes aux libertés et une dépendance accrue aux acteurs étrangers. Faustin-Archange Touadéra conserve toutefois une base électorale solide, particulièrement dans les zones urbaines et administratives, où son réseau reste fortement implanté.
Anicet Georges Dologuélé : la candidature technocratique et rassurante
Ancien Premier ministre et ex-président de la Banque de Développement des États de l’Afrique Centrale (BDEAC), Anicet Georges Dologuélé s’affiche comme l’une des principales alternatives au président sortant. Leader de l’Union pour le Renouveau Centrafricain (URCA), il incarne un courant réformateur, centré sur la rigueur économique, la diplomatie et le retour à un État institutionnellement apaisé.
Sa crédibilité technocratique, appréciée des milieux internationaux et urbains, fait de lui un challenger sérieux. Toutefois, son manque d’implantation en zones rurales, ainsi que les polémiques liées à sa double nationalité à laquelle il a renoncé peuvent fragiliser son ascension. Anicet Georges Dologuélé peut néanmoins compter sur un électorat désireux d’un changement sans rupture brutale.
Henri-Marie Dondra : l’ancien Premier ministre devenu opposant résolu
Après avoir été l’un des hommes clés du régime de Touadéra, Henri-Marie Dondra a opéré une rupture spectaculaire en rejoignant l’opposition. Ex-ministre des Finances, puis Premier ministre de 2021 à 2022, il connaît les rouages de l’État et se positionne désormais comme le porte-voix d’une « restauration démocratique ».
Son expérience financière et administrative constitue un atout majeur, tout comme son discours critique envers les dérives institutionnelles. Mais sa proximité passée avec le pouvoir et les attaques visant son entourage, qualifiées de « machinations politiques », constituent des obstacles. Sa candidature séduit surtout une frange de jeunes urbains et de cadres en quête d’un changement crédible mais pragmatique.
Eddy Symphorien Kparékouti : le chantre du renouveau populaire
Plus jeune et moins institutionnel que ses adversaires, Eddy Symphorien Kparékouti représente un courant alternatif porté par un discours profondément social. Président du Parti de l’Unité et de la Reconstruction (PUR), il se présente comme un défenseur du peuple, décidant de « reconstruire la société jusqu’à la racine ».
Sa force réside dans sa capacité à mobiliser la jeunesse et à proposer un discours accessible, ancré dans la vie quotidienne. Mais son manque d’expérience politique et ses adversaires qui le tournent parfois en dérision fragilisent sa candidature. Eddy Symphorien Kparékouti incarne néanmoins une voix importante du renouveau citoyen dans cette campagne.
Serge Ghislain Djorie : le panafricaniste déterminé
Leader du Collectif d’Alternance pour une Nouvelle Centrafrique (CAPNCA), Serge Ghislain Djorie construit sa campagne autour d’un discours panafricaniste et souverainiste. Médecin de formation, il parle à une jeunesse en quête d’affirmation et d’indépendance, dans un pays marqué par les influences extérieures.
Sa volonté de transformer profondément les institutions rencontre un écho croissant auprès de militants réformistes. Néanmoins, sa visibilité nationale demeure limitée et ses contestations répétées devant le Conseil constitutionnel lui ont valu une image ambivalente. Sa candidature, bien qu’encore minoritaire, participe à la recomposition idéologique du pays.
Marcelin Yalemendé : l’indépendant discret mais déterminé
Candidat indépendant, Marcelin Yalemendé se démarque par son absence d’appartenance aux grands blocs politiques. Peu médiatisé, il mise sur une posture de neutralité et de rassemblement, à rebours des affrontements traditionnels.
Son profil pourrait séduire une catégorie d’électeurs lassés des partis établis, mais l’absence d’un appareil solide et d’une exposition nationale forte limite ses chances d’influence. Il demeure toutefois une voix importante dans un paysage où les candidatures indépendantes cristallisent un ras-le-bol croissant.
Aristide Briand Reboas : le sécuritaire intellectuel
Ancien directeur des Renseignements généraux et ex-ministre de la Jeunesse et des Sports, Aristide Briand Reboas présente une candidature marquée par l’expertise sécuritaire et la réflexion intellectuelle. Auteur engagé, il prône la réconciliation nationale, la paix durable et un État fort.
Sa connaissance profonde de l’appareil sécuritaire constitue un avantage distinctif. Toutefois, son capital de sympathie auprès du grand public reste limité, et son parti manque de structures robustes. Sa candidature peut toutefois séduire les milieux patriotiques et les électeurs en quête d’un leadership stratégique.
Un scrutin dominé par les rapports de forces
La présidentielle de 2025 s’annonce comme un moment charnière pour la Centrafrique. Si Faustin-Archange Touadéra part avec un avantage institutionnel considérable, ses challengers Dologuélé et Dondra en tête entendent capitaliser sur l’usure du pouvoir et l’aspiration croissante à un renouvellement démocratique.
Les autres candidats, porteurs de visions alternatives, enrichissent le débat national et témoignent d’un paysage politique en recomposition. Reste à savoir si, dans un contexte sécuritaire fragile et sous l’œil attentif de la communauté internationale, cette élection marquera la continuité ou l’ouverture d’un nouveau chapitre pour la République centrafricaine.
