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Au Chili, le coronavirus met entre parenthèses la vague des manifestations

Il y a six mois, une vague de manifestations a commencé à agiter les rues du Chili, réclamant de profonds…

Il y a six mois, une vague de manifestations a commencé à agiter les rues du Chili, réclamant de profonds changements sociaux et l’adoption d’une nouvelle Constitution, mais la pandémie de Covid-19 a mis cette rage entre parenthèses.

Si le pays n’avait pas été rattrapé par la crise sanitaire mondiale, les Chiliens s’apprêteraient à aller aux urnes pour décider si oui ou non la Constitution héritée de la dictature d’Augusto Pinochet (1973-1990) devait être modifiée.

Destiné à apaiser la crise sociale commencée le 18 octobre, ce référendum, initialement prévu le 26 avril, a été reporté au 25 octobre.

La crise sociale, déclenchée par une hausse du prix du ticket de métro dans la capitale, s’est nourrie de la colère de la population face aux profondes inégalités socio-économiques et à la déconnexion de la classe politique vis-à-vis des problèmes quotidiens de la majorité des 18 millions de Chiliens.

Après six mois d’un mouvement de contestation sans précédent qui a fait 31 morts, le climat tendu de contestation qui secouait le pays a laissé la place à une ambiance calme, mélange de peur de la maladie et d’obéissance aux consignes de autorités, vidant les rues de Santiago, Valparaiso ou Concepcion.

A présent, le Chili compte ses morts du Covid-19, déjà plus d’une centaine, parmi les quelque 8.000 cas officiellement recensés.

Mais cette union communautaire contre le virus n’est qu’une pause et « bien sûr, les problèmes qui ne sont plus exprimés publiquement aujourd’hui, sont toujours là », déclare à l’AFP Patricio Zapata, avocat constitutionnaliste et membre du parti d’opposition Démocratie chrétienne.

« Nous nous trouvons dans une parenthèse et il existe une possibilité qu’après cette parenthèse, les choses reviennent à une situation en apparence similaire » à celle d’avant l’explosion sociale, prévient Juan Pablo Luna, professeur de sciences politiques de l’université catholique du Chili.

– « Tous sains en octobre » –

Mais cela « n’arrivera que si les conséquences de la crise sont telles que les gens préfèreront remettre à plus tard leurs revendications pour faire face à des besoins économiques de base » plus urgents, ajoute-t-il.

Les conséquences de la pandémie sur l’économie ont conduit le Fonds monétaire international (FMI) à prévenir que certains pays, comme le Chili, l’Equateur ou la France « continuent de courir le risque de nouvelles manifestations, particulièrement si les mesures de soutien sont jugées insuffisantes pour atténuer la crise du Covid-19 et ses retombées économiques, ou si elles sont jugées injustes en favorisant les riches » ou les multinationales.

Cette pandémie pourrait mettre en lumière le caractère inégalitaire de la société chilienne, un des principaux griefs des manifestants qui réclamaient davantage de présence de l’Etat dans les domaines de la santé, de l’éducation et des retraites, aux mains du secteur privé depuis le régime militaire de Pinochet.

« Selon moi, la gestion de la crise sanitaire peut probablement finir par mettre de nouveau à nu des problèmes structurels, comme les inégalités, et, dans ce cas, il me semble assez probable que le coronavirus finisse (…) par percuter le gouvernement en entraînant une seconde vague de protestations », juge Juan Pablo Luna.

Outre un scénario de ce type, l’avocat Patricio Zapata voit, lui, une autre possibilité: le fait d’avoir vécu une pandémie pourrait donner « plus d’élan aux forces du dialogue et de la coopération, ouvrant la voie à de grands accords ».

« Je souhaite tourner la page de ce chapitre pour nous unir à nouveau en faveur d’un changement politique, de Constitution. Tous sains en octobre ! », lance de son côté Maria José Gutiérrez, militante âgée de 30 ans, qui a lancé la campagne « Moi j’approuve », en référence à un nouveau texte fondateur.


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