La BCE prête à sortir l’arsenal monétaire face au coronavirus

Seule grande banque centrale à n’avoir pas encore réagi à l’épidémie de coronavirus, la Banque centrale européenne devrait sortir jeudi un nouvel arsenal monétaire face à cette menace aussi inédite que difficile à évaluer.

« Chacun espère que la banque centrale ramènera le calme », alors que la panique des marchés a atteint des niveaux rappelant la crise financière de 2008-2009, souligne Bruno Cavalier, économiste chez Oddo Seydler.

En perturbant la vie quotidienne et l’économie avant de se muer « en choc financier majeur », aux conséquences imprévisibles, cette épidémie constitue « le premier vrai test pour Christine Lagarde », aux manettes de la depuis novembre, observe M. Cavalier.

D’autant que la Réserve fédérale américaine a baissé ses taux de 0,5 point dès le 3 mars, sans attendre sa réunion mi-mars ni une quelconque action coordonnée. Et qu’elle a été imitée mercredi par la Banque d’Angleterre.

Si les banquiers centraux avaient répondu de concert à la crise des « subprime », à l’été 2008, cette fois chacun a agi « dans son coin » et mis les autres « sous pression, voire en difficulté », estime Eric Dor, directeur de recherche à l’Institut d’économie scientifique et de gestion (IESEG).

– Prêts aux PME –

Ainsi, la Fed n’a guère apaisé les marchés et a de surcroît renchéri l’euro face au dollar. Cela complique la tâche de la BCE: un euro fort nuit à la compétitivité de la zone euro et réduit les pressions inflationnistes. Or l’institut est depuis 2013 en-dessous de son objectif, soit une inflation tendant vers 2%.

Personne ne doute donc que la BCE délivre jeudi son ordonnance anti-coronavirus, malgré des marges de manœuvre réduites puisque son principal taux, permettant aux banques de se refinancer, est déjà à zéro depuis 2016.

Dans un communiqué laconique la semaine dernière, l’institution a promis des mesures « appropriées », et surtout « ciblées », face à l’épidémie.

Jeudi, elle pourrait donc innover avec un programme de prêts bancaires ciblant les PME en difficulté, pour aider les entreprises perturbées par l’épidémie à boucler leurs fins de mois, indique à l’AFP une source proche de la BCE.

Côté taux, l’institut pourrait descendre à -0,60%, contre -0,50% jusque-là, celui appliqué aux liquidités que les banques laissent à la banque centrale au lieu de les prêter aux ménages et aux entreprises.

Destinée à stimuler l’offre de crédits, cette politique de taux bas vaut déjà à la BCE de vives critiques, en particulier en Allemagne, où on l’accuse de spolier les épargnants.

Autre piste: augmenter le rythme des rachats de dette sur le marché, réactivés depuis novembre 2019 à raison de 20 milliards d’euros par mois, « aussi longtemps que nécessaire ».

– Aux Etats d’agir –

Mais pour que la politique monétaire ne soit pas seule à la manœuvre, Mme Lagarde a interpellé mardi les chefs de gouvernement européens en faisant « référence à (la crise financière de) 2008 » lors d’une conférence téléphonique, a indiqué à l’AFP une source européenne.

Elle souhaitait mettre les décideurs devant leurs responsabilités, quand bien même les effets du virus sur l’économie restent « très difficiles à prévoir », a ajouté Mme Lagarde, selon la même source.

L’Allemagne, déjà critiquée par la BCE pour sa réticence à recourir à la dépense publique, a cette fois promis de faire « ce qui est nécessaire », a indiqué mercredi la chancelière, Angela Merkel, quitte à revenir sur son dogme du zéro déficit.

Pays européen le plus touché par l’épidémie du Covid-19, alors même qu’elle est déjà fragilisée par son énorme dette publique, l’Italie a débloqué mercredi une enveloppe d’aides de 25 milliards d’euros.

Enfin, l’UE a fait miroiter mardi un « fonds d’investissement en réponse » à l’épidémie allant jusqu’à 25 milliards d’euros. Le lendemain, elle précisait cependant qu’il s’agirait d’enveloppes déjà existantes.

Quant aux mesures attendues jeudi de la BCE, elles peuvent au moins « contribuer à stopper la déroute des marchés », souligne Florian Hense, économiste chez Berenberg. Un enjeu crucial pour maintenir un bon niveau de « liquidité » et éviter d’asphyxier un peu plus les entreprises.

Taux, prêts aux PME, QE: la potion anti-coronavirus attendue de la BCE

Pressée d’agir face à l’épidémie de coronavirus, la Banque centrale européenne devrait dégainer jeudi une série de mesures pour calmer les marchés financiers et soutenir les secteurs les plus touchés.

Voici les principales actions envisagées.

– Baisser un taux

Comme la BCE maintient son principal taux à zéro depuis mars 2016, elle ne dispose pas des marges de manoeuvre de la Réserve fédérale américaine, qui vient de descendre le sien de 0,5 point pour le porter dans une fourchette de 1% à 1,25%.

Mais les gardiens de l’euro pourraient abaisser leur « taux de dépôt », qui s’applique aux liquidités que les banques choisissent de leur confier faute de les distribuer sous forme de crédits.

Déjà négatif, à -0,50%, ce taux pourrait être porté à -0,60%, tout en laissant la possibilité de nouvelles baisses, pour inciter encore plus fortement les banques à prêter aux ménages et aux entreprises.

– Soulager les banques

Consciente que ce taux négatif rogne les marges des banques, la BCE exonère une partie des liquidités en excès, selon un système dit « two-tier » inauguré en septembre et élargi en novembre.

Selon Eric Dor, de l’Institut d’économie scientifique et de gestion, l’institut pourrait encore relever la proportion des dépôts dispensés de ce prélèvement: il pourrait désormais représenter « dix » fois les réserves obligatoires constituées par les banques pour faire face aux retraits de leurs clients, contre « six » actuellement.

La mesure profiterait principalement aux banques allemandes et françaises, aujourd’hui les plus pénalisées par les taux négatifs.

– Soutenir les PME

Depuis octobre, la BCE mène sa troisième campagne de prêts géants aux banques (dits TLTRO), à des taux très avantageux, à condition que les banques prêtent à leur tour aux ménages ou aux entreprises.

Comme elles empruntent au niveau du taux de dépôt, soit -0,50%, les banques recourant au TLTRO sont de fait rémunérées par la BCE quand elles prêtent de l’argent.

Il semble difficile d’assouplir encore ces conditions à quelques jours d’une nouvelle vague, mais la BCE pourrait concevoir un nouveau type de prêts ciblant « les entreprises non financières les plus touchées par la crise », en particulier les PME, selon Frederik Ducrozet, stratégiste chez Pictet Wealth Management.

La Banque d’Angleterre vient d’ailleurs de faire de même mercredi, en même temps qu’elle abaissait son principal taux.

– Augmenter les rachats de dette

La BCE a réactivé depuis novembre ses rachats de dette publique et privée, sa puissante arme anti-crise baptisée « QE » (« Quantitative Easing », « Assouplissement quantitatif »), déjà déployée entre mars 2015 et fin 2018.

L’institution détenait fin février 2.623 milliards d’euros de dette à son bilan, afin de maintenir de bonnes conditions financières sur les marchés.

Mais le conseil des gouverneurs de la BCE était apparu divisé comme jamais en septembre, au moment de décider la reprise de ces rachats de dette à raison de 20 milliards d’euros par mois.

La BCE pourrait toutefois augmenter le rythme de ses achats, à 30 milliards par mois selon les observateurs, en accentuant par exemple la part de la dette d’entreprise rachetée.

Elle pourrait aussi modifier les règles qui limitent le rachat de dette souveraine, voire envisager le rachat de dette ou d’actions de banques si la crise s’aggrave, avance Florian Hense, analyste chez Berenberg.

Mais la contestation n’est pas près de s’éteindre en Allemagne, où la Cour constitutionnelle doit se prononcer le 24 mars sur la validité du « QE ». Des eurosceptiques veulent faire établir qu’à travers cet outil, la BCE viole l’interdiction de financer directement les Etats.

Italie: le blocus de Codogno est levé, les habitants restent inquiets

Cette petite ville lombarde était devenue le symbole de l’arrivée du coronavirus en Italie: placés 15 jours en stricte quarantaine les habitants de Codogno (nord) ont été autorisés à ressortir cette semaine et sont désormais logés à la même enseigne que les autres Italiens, mais l’angoisse est toujours là.

Dans les rues, peu de voitures; les bars et les restaurants restent pour la plupart fermés et au MacDonald, les clients se font rares; pour entrer dans les supermarchés, il faut patienter une demi-heure dans une file où les clients se tiennent à distance réglementaire, masque sur la bouche, les entrées se faisant au rythme des sorties.

« La situation ne s’est pas améliorée. Les gens sortent, mais ont toujours peur », dit Roberta Franceschini, 30 ans, employée du bar Mania. « A mes yeux, la situation reste la même qu’il y a quelques jours. Personne ne sort, c’est un désastre », dit Marino Boccardi, 67 ans.

Ces deux semaines de quarantaine entamées le 23 février, entourés d’un cordon étanche surveillé par la police, « ont été difficiles, cela a dicté les vies de chacun d’entre nous », raconte Antonio Zetti, un retraité de 58 ans. « L’avenir m’inquiète. Nous ne savons pas si la période nécessaire pour surmonter l’impact social » de cet isolement « relève du très long terme ou du long terme », poursuit-il.

La décision de rouvrir le périmètre étanche autour de Codogno avait été commentée comme une bonne nouvelle dans le pays, bien vite éclipsée par l’interdiction de rassemblement et la restriction des déplacements dans toute l’Italie décidées le lendemain par les autorités.

« Nous avons besoin d’exporter le modèle Codogno à toute la Lombardie parce qu’il a démontré qu’il fonctionne. Codogno est l’unique endroit de Lombardie où la contagion s’est réduite », s’est félicité mercredi le président de la région Lombardie, Attilio Fontana.

Des voix s’étaient toutefois très vite élevées contre cette levée de la quarantaine, mettant en garde contre tout optimisme démesuré. C’est vrai que Codogno est l’endroit « où les contagions diminuent, contrairement au reste de l’Italie », dit à l’AFP Roberto Burioni, professeur de virologie à l’université Vita-Salute San Raffaelle de Milan.

« Mais cela n’a pas de sens à l’heure actuelle de parler d’immunité de groupe, parce qu’on ne sait pas encore si un individu qui a contracté le virus, et qui a guéri, est définitivement protégé contre une infection ultérieure », poursuit le spécialiste.

Taux, prêts aux PME, QE: la potion anti-coronavirus attendue de la BCE

Pressée d’agir face à l’épidémie de coronavirus, la Banque centrale européenne devrait dégainer jeudi une série de mesures pour calmer les marchés financiers et soutenir les secteurs les plus touchés.

Voici les principales actions envisagées.

– Baisser un taux

Comme la BCE maintient son principal taux à zéro depuis mars 2016, elle ne dispose pas des marges de manoeuvre de la Réserve fédérale américaine, qui vient de descendre le sien de 0,5 point pour le porter dans une fourchette de 1% à 1,25%.

Mais les gardiens de l’euro pourraient abaisser leur « taux de dépôt », qui s’applique aux liquidités que les banques choisissent de leur confier faute de les distribuer sous forme de crédits.

Déjà négatif, à -0,50%, ce taux pourrait être porté à -0,60%, tout en laissant la possibilité de nouvelles baisses, pour inciter encore plus fortement les banques à prêter aux ménages et aux entreprises.

– Soulager les banques

Consciente que ce taux négatif rogne les marges des banques, la BCE exonère une partie des liquidités en excès, selon un système dit « two-tier » inauguré en septembre et élargi en novembre.

Selon Eric Dor, de l’Institut d’économie scientifique et de gestion, l’institut pourrait encore relever la proportion des dépôts dispensés de ce prélèvement: il pourrait désormais représenter « dix » fois les réserves obligatoires constituées par les banques pour faire face aux retraits de leurs clients, contre « six » actuellement.

La mesure profiterait principalement aux banques allemandes et françaises, aujourd’hui les plus pénalisées par les taux négatifs.

– Soutenir les PME

Depuis octobre, la BCE mène sa troisième campagne de prêts géants aux banques (dits TLTRO), à des taux très avantageux, à condition que les banques prêtent à leur tour aux ménages ou aux entreprises.

Comme elles empruntent au niveau du taux de dépôt, soit -0,50%, les banques recourant au TLTRO sont de fait rémunérées par la BCE quand elles prêtent de l’argent.

Il semble difficile d’assouplir encore ces conditions à quelques jours d’une nouvelle vague, mais la BCE pourrait concevoir un nouveau type de prêts ciblant « les entreprises non financières les plus touchées par la crise », en particulier les PME, selon Frederik Ducrozet, stratégiste chez Pictet Wealth Management.

La Banque d’Angleterre vient d’ailleurs de faire de même mercredi, en même temps qu’elle abaissait son principal taux.

– Augmenter les rachats de dette

La BCE a réactivé depuis novembre ses rachats de dette publique et privée, sa puissante arme anti-crise baptisée « QE » (« Quantitative Easing », « Assouplissement quantitatif »), déjà déployée entre mars 2015 et fin 2018.

L’institution détenait fin février 2.623 milliards d’euros de dette à son bilan, afin de maintenir de bonnes conditions financières sur les marchés.

Mais le conseil des gouverneurs de la BCE était apparu divisé comme jamais en septembre, au moment de décider la reprise de ces rachats de dette à raison de 20 milliards d’euros par mois.

La BCE pourrait toutefois augmenter le rythme de ses achats, à 30 milliards par mois selon les observateurs, en accentuant par exemple la part de la dette d’entreprise rachetée.

Elle pourrait aussi modifier les règles qui limitent le rachat de dette souveraine, voire envisager le rachat de dette ou d’actions de banques si la crise s’aggrave, avance Florian Hense, analyste chez Berenberg.

Mais la contestation n’est pas près de s’éteindre en Allemagne, où la Cour constitutionnelle doit se prononcer le 24 mars sur la validité du « QE ». Des eurosceptiques veulent faire établir qu’à travers cet outil, la BCE viole l’interdiction de financer directement les Etats.

Coronavirus: Trump suspend tous les voyages de l’Europe vers les Etats-Unis pour 30 jours

Le président américain Donald Trump a annoncé mercredi la suspension pour 30 jours de tous les voyages depuis l’Europe vers les Etats-Unis afin d’endiguer l’épidémie de nouveau coronavirus qui a de nouveau affolé les marchés financiers.

« J’ai décidé de prendre des actions fortes mais nécessaires pour protéger la santé et le bien-être de tous les Américains », a annoncé M. Trump lors d’une allocution solennelle depuis le Bureau ovale de la Maison Blanche

« Pour empêcher de nouveaux cas de pénétrer dans notre pays, je vais suspendre tous les voyages en provenance d’Europe vers les Etats-Unis pour les 30 prochains jours », a-t-il ajouté, déplorant que l’Union européenne n’ait pas pris « les mêmes précautions » que les Etats-Unis face à la propagation du virus.

Cette mesure, qui entrera en vigueur vendredi à minuit (04H00 GMT samedi), ne concernera pas le Royaume-Uni, a précisé le milliardaire républicain.

Au cours de son allocution de dix minutes, le président de la première puissance mondiale a qualifié le nouveau coronavirus de « virus étranger ».

Il y a quelques jours, le chef de la diplomatie américaine Mike Pompeo avait provoqué une polémique, et l’ire de Pékin, en parlant de « virus de Wuhan ».

Le 45e président des Etats-Unis a achevé son discours en martelant sa conviction que l’avenir des Etats-Unis restait « plus radieux que personne ne peut l’imaginer ».

Le président américain est accusé par nombre d’élus démocrates de vouloir minimiser à tout prix l’ampleur de la crise sanitaire à venir et d’envoyer des messages confus, parfois en contradiction avec ceux des autorités sanitaires.

« Cela va disparaître, restez calme », avait-il encore déclaré mardi. « Tout se déroule bien. Beaucoup de bonnes choses vont avoir lieu ».

– « L’Europe est la nouvelle Chine » –

M. Trump a par ailleurs appelé le Congrès américain à adopter rapidement une réduction des taxes sur les salaires pour aider les ménages américains à surmonter l’impact économique de l’épidémie de coronavirus.

Cette proposition faite par son administration en début de semaine n’a pas eu un écho très favorable auprès des élus, y compris de son propre parti.

Le président a aussi annoncé le report de la date butoir de paiement des impôts pour certains individus et entreprises, qui devrait permettre selon lui de réinjecter 200 milliards de dollars de liquidités supplémentaires dans l’économie.

Wall Street a connu une nouvelle séance noire mercredi: le Dow Jones Industrial Average s’est effondré de 5,87%, à 23.550,74 points, et le Nasdaq a perdu 4,70%, à 7.952,05 points.

Quelques heures avant l’allocution présidentielle, le directeur des Centres de détection et de prévention des maladies (CDC) Robert Redfield avait estimé que le principal risque de propagation de l’épidémie pour les Etats-Unis venait d’Europe.

« La vraie menace pour nous, c’est désormais l’Europe », avait-il affirmé. « C’est de là qu’arrivent les cas. Pour dire les choses clairement, l’Europe est la nouvelle Chine ».

Début février, Washington avait provisoirement interdit l’entrée aux Etats-Unis des non-Américains s’étant récemment rendus en Chine. Le président Trump a longtemps invoqué cette décision drastique pour assurer que la propagation de l’épidémie était sous contrôle sur le territoire américain.

Le département d’Etat a aussi recommandé aux ressortissants américains d’éviter les voyages non indispensables en Italie, un avertissement aux voyageurs susceptible d’être au moins partiellement étendu au reste de l’Europe.

Les Etats-Unis ont dépassé mercredi la barre des 1.200 cas d’infection au nouveau coronavirus, et 38 personnes en sont mortes, selon les statistiques de l’université américaine Johns Hopkins.

Le Congrès américain bride l’action militaire de Trump contre l’Iran

Le Congrès des Etats-Unis a définitivement adopté mercredi une résolution visant à limiter une action militaire de Donald Trump contre l’Iran, un camouflet pour le président américain, qui devrait toutefois y opposer son veto.

Le texte présenté par l’opposition démocrate avait déjà été approuvé mi-février par le Sénat, grâce au soutien d’une partie des membres du camp du milliardaire républicain qui dominent la chambre haute. Il a été adopté mercredi par la Chambre des représentants, qui est elle à majorité démocrate, par 227 voix contre 186.

Là aussi, six républicains ont joint leur voix à celles des démocrates.

Il doit maintenant être soumis au président Trump pour promulgation, mais la Maison Blanche a déjà fait savoir qu’il y opposerait son veto.

Selon cette résolution, le président des Etats-Unis ne peut pas engager ses militaires dans des « hostilités contre la République islamique d’Iran » ou « toute partie de son gouvernement ou de son armée » sans « autorisation explicite » du Congrès, sous la forme d’une déclaration de guerre ou d’un feu vert spécifique.

Il s’agit d’une réponse parlementaire aux tensions entre les deux pays ennemis, qui avaient atteint leur paroxysme lorsque Washington a tué le 3 janvier, dans une frappe ordonnée par Donald Trump, le puissant général iranien Qassem Soleimani.

Les démocrates et certains républicains avaient exprimé leur inquiétude de voir l’escalade dégénérer en confrontation militaire directe. Mais après une riposte de Téhéran qui a tiré des missiles sur des bases utilisées par l’armée américaine en Irak sans faire de mort, la tension extrême était quelque peu retombée.

– Nouvelle escalade en Irak –

L’administration Trump affirme que sa « campagne de pression maximale » contre Téhéran, avec des sanctions sans précédent, ainsi que la frappe du 3 janvier, ont « rétabli la dissuasion à l’encontre de la République islamique ».

Mais les attaques contre les forces américaines en Irak, le plus souvent attribuées par Washington à l’Iran ou à ses alliés locaux, n’ont pas totalement cessé.

Des tirs de roquette contre une base militaire en Irak ont même fait mercredi pour la première fois trois morts, dont deux soldats américain et britannique.

Aussitôt après cette attaque –la plus meurtrière recensée contre une base abritant des soldats américains depuis plusieurs années–, des raids aériens ont visé des positions de supplétifs de l’Iran à la frontière entre l’Irak et la Syrie, selon l’Observatoire syrien des droits de l’homme (OSDH).

Cette nouvelle escalade pourrait représenter un test pour la volonté de contrôle du Congrès.

Pour l’élu démocrate Steny Hoyer, « dans de nombreux pays au monde, une seule personne » décide s’il convient d’envoyer des jeunes à la guerre: « ce sont des dictateurs ». « Nos pères fondateurs n’ont pas voulu que des dictateurs dirigent l’Amérique », a-t-il lancé avant le vote.

« Pendant des années, le Congrès a abdiqué ses responsabilités en matière de guerre. Mais maintenant une majorité transversale au Sénat et à la Chambre a clairement statué que nous ne devrions pas nous engager dans des hostilités avec l’Iran sans un vote du Congrès », s’est félicité dans un communiqué le sénateur démocrate Tim Kaine, auteur de la résolution.

Il a souligné que son texte permettait au président de défendre les Etats-Unis en cas d’attaque.

Selon lui, « si le président Trump est sérieux au sujet de sa promesse de mettre fin aux guerres sans fin, il promulguera cette résolution ».

Or, l’ex-homme d’affaires new-yorkais avait prévenu avant le vote du Sénat qu’une telle loi lancerait « un très mauvais signal » pour la sécurité des Etats-Unis. S’il confirme son veto, le Congrès ne devrait pas réussir à réunir la majorité qualifiée nécessaire pour passer outre.

L’élu républicain Mike McCaul lui a fait écho en estimant que les « ennemis » de l’Amérique suivaient ce débat de près. « Il faut qu’ils aient bien à l’esprit que s’ils tuent des Américains, ils vont en payer le prix », a-t-il lancé sous les applaudissements nourris de son camp, après avoir salué la mort de Qassem Soleimani.

Au Mali, le tombeau des Askia, patrimoine mondial, va être réhabilité

Le tombeau des Askia à Gao (nord-est), un des quatre sites au Mali inscrits au patrimoine de l’Unesco, va être réhabilité, ont indiqué mercredi les autorités maliennes et une organisation de sauvegarde des monuments en zone de conflit.

Le plan de réhabilitation, qui s’étend sur deux ans jusqu’en 2022, doit permettre de sauvegarder « un témoignage spectaculaire de la richesse du patrimoine malien », a déclaré à l’AFP Valery Freland, directeur de l’Aliph, organisation qui finance à hauteur de 500.000 dollars le projet en collaboration avec l’Etat malien.

Le site du tombeau des Askias, construit en terre en 1495 par l’empereur songhoy Askia Mohamed, comprend un tombeau pyramidal et une mosquée. Celle-ci, l’une des plus grandes de la ville, est encore utilisée par les habitants.

Le site ne présente pas de signe flagrant de dégradation, mais le risque est structurel.

« Il faut restaurer certains piliers, notamment », a déclaré le directeur du patrimoine malien, Moulaye Coulibaly, lors d’une visite sur place. A cela doit s’ajouter une réfection du mur d’enceinte et de la mosquée attenante au tombeau, entre autres.

Classé au patrimoine mondial en 2004, le site a été ajouté en 2012 sur la liste du patrimoine en péril, en raison du conflit armé qui commençait alors à affecter le Mali et qui se poursuit aujourd’hui.

Cette année-là, quand un groupe jihadiste avait occupé Gao pendant dix mois, la population de la ville s’était levée pour protéger ce patrimoine, l’un des principaux héritages de la culture songhoy dont le peuple régna sur un large empire ouest-africain entre le 15e et le 16ème siècles.

« Nous avons craint que les jihadistes fassent comme à Tombouctou » où ils avaient détruit plusieurs mausolées, explique Mahamane Hameye, membre de la société civile et parmi les fondateurs du mouvement des « Patriotes » qui défendit le tombeau.

La menace jihadiste s’est éloignée du fait de la présence de forces maliennes, françaises et onusiennes.

Créée en 2017 sous l’impulsion de la France, l’Aliph est une organisation internationale de sauvegarde du patrimoine en zone de conflit. Huit pays en sont donateurs, parmi lesquels la France, les Émirats arabes unis et l’Arabie saoudite.

Irak: des tirs de roquettes font trois morts dont deux soldats américain et britannique

Des tirs de roquettes contre une base militaire en Irak ont pour la première fois fait trois morts mercredi, dont deux soldats américain et britannique, marquant une escalade dans les tensions entre Washington et ses alliés d’une part, et Téhéran et ses supplétifs de l’autre.

Aussitôt après cette attaque –la plus meurtrière recensée contre une base abritant des soldats américains depuis plusieurs années–, des raids aériens ont visé des positions de supplétifs de l’Iran à la frontière entre l’Irak et la Syrie, a indiqué à l’AFP le directeur de l’Observatoire syrien des droits de l’Homme (OSDH), Rami Abdel Rahmane. Ces raids ont notamment visé des factions armées irakiennes.

Ces tirs de roquette sont la 22ème attaque depuis la fin octobre contre des intérêts américains en Irak. Ils n’ont pas été revendiqués mais Washington –qui dirige la coalition internationale antijihadiste en Irak– attribue régulièrement ces attaques aux factions irakiennes pro-Iran.

Après les raids aériens, qui semblent être des représailles, le spectre de nouvelles violences plane en Irak, où les tensions entre les deux grands alliés du pouvoir à Bagdad, Téhéran et Washington, ont déjà dégénéré ces derniers mois.

– « Dix explosions » –

Deux soldats, l’un américain et l’autre britannique, ainsi qu’un sous-traitant américain ont été tués mercredi soir dans le tir de dix roquettes sur la base irakienne de Taji, au nord de Bagdad, a indiqué à l’AFP un responsable militaire américain.

Plus tôt, un responsable de la coalition internationale antijihadiste emmenée par les Etats-Unis avait affirmé à l’AFP que l’attaque avait fait plusieurs blessés, certains légèrement touchés et d’autres grièvement atteints.

Le responsable n’avait pas précisé leur nationalité. La coalition compte des dizaines d’Etats membres, dont les Etats-Unis qui ont déployé 5.200 soldats sur diverses bases militaires en Irak.

Quelques heures plus tard, « dix explosions » ont secoué une zone au sud de la ville syrienne de Boukamal, frontalière de l’Irak, a rapporté à l’AFP M. Abdel Rahmane.

« Trois avions probablement de la coalition internationale ont visé des positions iraniennes et des factions armées alliées, dont le Hachd al-Chaabi irakien », a indiqué le directeur de l’OSDH, en référence à cette coalition de paramilitaires désormais intégrés aux forces régulières irakiennes.

Les attaques à la roquette contre des soldats, des diplomates ou des installations des Etats-Unis en Irak ont déjà tué un sous-traitant américain et un soldat irakien par le passé.

– Marasme politique –

Régulièrement, une ou plusieurs roquettes s’abattent sur des bases accueillant des soldats américains ou sur l’ultrasécurisée Zone verte de Bagdad où siège l’ambassade américaine. Mais le nombre de roquettes tirées mercredi est particulièrement élevé.

Deux jours après la mort d’un Américain dans les tirs de 30 roquettes sur une base militaire irakienne à Kirkouk (nord) fin 2019, l’armée américaine avait frappé cinq bases, en Irak et en Syrie, d’une faction armée pro-Iran, les brigades du Hezbollah, faisant 25 morts dans ses rangs.

Les tensions s’étaient ensuite accentuées entre Washington et Téhéran, menant à l’assassinat à Bagdad du puissant général iranien Qassem Soleimani et de son lieutenant irakien dans une frappe américaine, ainsi qu’à des bombardements iraniens de bases irakiennes abritant des soldats américains en représailles.

La coalition internationale formée contre le groupe Etat islamique (EI) en 2014 continue de combattre et d’apporter un appui aérien aux troupes irakiennes car si l’EI a perdu son territoire, il conserve des cellules clandestines toujours capables de mener des attaques.

Dimanche, deux soldats américains ont été tués dans des combats contre des jihadistes dans le nord irakien, alors même que la coalition avait annoncé suspendre ses activités en Irak en raison des tensions entre Téhéran et Washington.

Le Parlement irakien a récemment voté l’expulsion des 5.200 soldats américains du pays, une décision qui doit encore être appliquée par le gouvernement. Mais l’Irak est plongé depuis des mois dans le marasme politique et est en proie depuis début octobre à un mouvement de contestation antigouvernemental inédit.

Le gouvernement démissionnaire depuis décembre n’a toujours pas été remplacé faute d’accord au sein du Parlement le plus éclaté de l’histoire récente de l’Irak.

L’OMS qualifie l’épidémie du Covid-19 de « pandémie »

L’Organisation mondiale de la santé (OMS) a qualifié mercredi l’épidémie du Covid-19, qui a contaminé plus de 110.000 personnes dans le monde depuis fin décembre, de « pandémie », mais a assuré que le coronavirus pouvait « être maîtrisé ».

Au cours des deux dernières semaines, le nombre de cas en dehors de la Chine a été multiplié par 13 et le nombre de pays touchés a triplé, selon l’OMS.

« Nous sommes profondément préoccupés tant par les niveaux alarmants de propagation et de gravité que par les niveaux alarmants d’inaction » dans le monde, a déclaré le directeur général de l’OMS, Tedros Adhanom Ghebreyesus, en conférence de presse à Genève.

« Nous avons donc estimé que le Covid-19 peut être qualifié de pandémie », a-t-il dit.

« Nous n’avons jamais vu une pandémie déclenchée par un coronavirus », a-t-il dit.

« Décrire la situation comme une pandémie ne change pas l’évaluation de la menace posée par ce coronavirus. Cela ne change pas ce que fait l’OMS, et cela ne change pas ce que les pays devraient faire », a-t-il affirmé.

Le patron de l’OMS a estimé que dans « les jours et les semaines à venir », le nombre de cas, de décès et de pays touchés allait augmenter. Mais il a appelé, une fois de plus, les pays à agir pour « contenir » l’épidémie, qui a fait plus de 4.000 morts dans le monde.

« Nous devons être plus agressifs », a insisté Tedros Adhanom Ghebreyesus. « Plusieurs pays ont démontré que le virus peut être supprimé ou maîtrisé ».

Comme ces derniers jours, l’OMS a continué d’appeler la communauté internationale à « endiguer » l’épidémie plutôt que de simplement en « atténuer » l’impact.

– ‘Italie et Iran souffrent’ –

Apparu en décembre en Chine, le coronavirus affecte tous les continents, sauf l’Antarctique, et perturbe la vie quotidienne et économique dans un nombre croissant de pays.

« L’Iran et l’Italie sont en première ligne, ils souffrent », a souligné le directeur exécutif du Programme pour les urgences de l’OMS, Michael Ryan, assurant que d’autres pays allaient connaître la même situation.

« En ce moment en Iran, il y a une pénurie d’appareils d’assistance respiratoire, d’oxygène », a-t-il détaillé.

Le directeur général de l’OMS a assuré pour sa part que « l’Iran fait de son mieux ». « Ils ont besoin de beaucoup d’équipements. Nous essayons de mobiliser davantage de soutien pour l’Iran », a-t-il insisté.

Les responsables de l’OMS n’ont en revanche pas souhaité établir la liste des pays qui n’agissaient pas assez face à l’épidémie, M. Ryan faisant valoir que l’agence spécialisée des Nations unies « ne critiquait pas les Etats membres en public ». « Ce que nous essayons de faire c’est de travailler avec les Etats membres ».

Il a en revanche critiqué les pays qui imposaient beaucoup trop de conditions, telles qu’être très âgé ou revenir de Chine, pour tester les personnes.

Il a également appelé la communauté internationale à renforcer son système de surveillance, à mieux protéger les centres hospitaliers et à ne pas cesser de détecter les cas et de suivre les contacts des personnes malades afin de stopper la chaîne de transmission du coronavirus.

Et « d’autres pays ne communiquent pas bien avec leur population », tandis que d’autres peinent à s’organiser et coordonner leur action, a déclaré l’expert de l’OMS.

Harvey Weinstein ou la chute d’un producteur de cinéma visionnaire

Il était un producteur de cinéma visionnaire, faiseur d’Oscars, donateur du parti démocrate. Sa condamnation mercredi à 23 ans de prison, deux semaines après qu’il eut été reconnu coupable d’agressions sexuelles par un jury new-yorkais, scelle la descente aux enfers d’Harvey Weinstein, devenu l’incarnation du prédateur sexuel pour le mouvement #MeToo.

L’accession au gotha d’Hollywood de ce fils d’un diamantaire new-yorkais avait pris des années, il devint paria en quelques jours. En octobre 2017, le New York Times et le New Yorker publient les témoignages de femmes, actrices ou mannequins pour la plupart, accusant le producteur de les avoir agressées sexuellement, puis de les avoir parfois payées pour se taire.

Trois semaines après, plus de 80 femmes, dont des célébrités comme Ashley Judd, Angelina Jolie, Salma Hayek ou Léa Seydoux, l’avaient accusé de harcèlement ou d’agressions allant du baiser forcé au viol, à New York, Los Angeles, Cannes, Paris, Londres ou Toronto, sur plus de trois décennies.

Harvey Weinstein, qui aura 68 ans le 19 mars, marié deux fois et père de cinq enfants, a eu beau maintenir que ses relations étaient toutes consenties, #MeToo était né: ce mouvement a dénoncé les abus sexuels présumés de centaines d’hommes de pouvoir.

Celui qui était la coqueluche des festivals du 7e art est banni de l’Académie du cinéma qui remet les Oscars. Les plaintes contre lui au civil se multiplient.

Le 25 mai 2018, il est inculpé à New York, pour deux agressions seulement, une en 2006 et l’autre en 2013. Les images du producteur menotté font le tour du monde.

En liberté surveillée jusqu’à son procès, il fait profil bas pendant des mois.

Peu avant le début des audiences en janvier, il donne une rare interview, qui suscitera un tollé.

« J’ai fait plus de films réalisés par des femmes et sur des femmes que n’importe quel producteur (…) J’étais le premier! J’étais le pionnier! », déclarait-il au New York Post.

Il n’a pas témoigné à son procès, mais lors du prononcé de sa peine vendredi, il s’est présenté comme une victime du mouvement #MeToo.

« J’étais le premier exemple et maintenant, il y a des milliers d’hommes accusés », a-t-il fait valoir. « Je suis inquiet pour ce pays ».

Il a aussi plaidé auprès du juge qu’il ne « verrait peut-être jamais plus ses enfants ».

– Roi des Oscars –

Beaucoup d’accusations contre Harvey Weinstein datent des années 1990 ou du début des années 2000, les grandes années de Miramax, le studio qu’il créa en 1979 avec son frère cadet Bob (Mira pour leur mère Miriam, Max pour leur père).

Après « Sexe, mensonges et vidéo », de Steven Soderbergh, encensé par la critique en 1989, Miramax produit le premier succès de Quentin Tarantino, « Pulp Fiction » (1994), puis « Le Patient anglais » (1996, neuf Oscars) ou « Shakespeare in Love » (1998, sept Oscars).

Les frères Weinstein revendent Miramax à Disney dès 1993, mais y travaillent jusqu’en 2005, année où ils lancent The Weinstein Company, qui produira encore de grands succès, comme « Inglourious Basterds » de Tarantino (2009), « Le Discours d’un roi » (2010) ou « The Artist » (2011).

De 1990 à 2016, le producteur, surnommé « Harvey les ciseaux » pour ses interventions féroces au montage, décrocha 81 fois les célèbres statuettes d’Hollywood.

Lors de la cérémonie des Golden Globes en 2012, Meryl Streep le qualifia, en riant, de « Dieu ».

Aujourd’hui, s’il inspire Hollywood, c’est comme personnage maléfique: un thriller inspiré du scandale, « The Assistant », est sorti fin janvier et au moins un autre est en gestation, produit par Brad Pitt.

Un temps, sa fortune était évaluée entre 240 et 300 millions de dollars, et il contribuait généreusement aux campagnes de candidats démocrates, dont Barack Obama et Hillary Clinton.

Mais il a vendu depuis deux ans cinq de ses propriétés, pour 60 millions de dollars, selon l’accusation.

La Weinstein Company a disparu: mise en faillite, ses actifs ont été rachetés par le fonds d’investissement Lantern.

Ses avocats ont négocié un pré-accord de 25 millions de dollars pour solder la plupart des plaintes déposées contre lui au civil, sans qu’il ait à verser un centime, mais ses frais d’avocats se chiffrent en millions.

Il doit payer les pensions alimentaires de ses ex-femmes — la deuxième, la styliste Georgina Chapman, l’a quitté après le scandale.

Après 10 jours d’hospitalisation, pendant lesquels on lui a installé un « stent » (extenseur cardiovasculaire), il a passé les derniers jours à la prison de Rikers Island. Il devrait maintenant être transféré dans une autre prison de l’Etat de New York.

Le procureur de Los Angeles l’a également inculpé pour deux agressions sexuelles. Et ses avocats, qui ont toujours affirmé que la médiatisation de son dossier le condamnait d’avance, devraient faire appel.

La Finlande arrête un Sierra-Léonais pour des exactions pendant la guerre au Liberia

Un homme soupçonné de meurtres, viols et d’utilisation d’enfants soldats pendant la guerre civile au Liberia il y a une vingtaine d’années a été arrêté en Finlande, a déclaré la police mercredi.

Ce Sierra-Léonais, né en 1969, est accusé d’avoir commis « des crimes de guerre et des crimes contre l’humanité aggravés » quand il était un haut responsable du Front révolutionnaire uni (RUF), une armée rebelle sierra-léonaise qui a participé de 1999 à 2003 à la guerre civile du Liberia.

L’homme, qui vit en Finlande depuis dix ans, est soupçonné de crimes, notamment « d’homicide et de violence sexuelle, ainsi que de recrutement et de déploiement d’enfants soldats », a expliqué le commissaire Thomas Elfgren du Bureau national d’enquête de Finlande, cité dans un communiqué.

La justice présume qu’il a, à la fois, commis ces crimes et incité d’autres personnes à les commettre, a indiqué la police.

L’ONG Civitas Maxima, qui défend les victimes de crimes de guerre, a dans un communiqué identifié cet homme comme étant Gibril Massaquoi, lieutenant-colonel et porte-parole du RUF.

La guerre civile au Liberia, l’un des plus atroces conflits du continent africain, a fait quelque 250.000 morts entre 1989 et 2003.

Elle a été marquée par des massacres commis par des combattants souvent drogués, des mutilations, des actes de cannibalisme, le recrutement forcé d’enfants soldats.

La police finlandaise avait ouvert en 2018 son enquête, interrogeant plusieurs dizaines de personnes au Liberia et en Sierra Leone.

Les juges du tribunal de Tampere (ouest) doivent décider jeudi du placement ou non de cet homme en détention provisoire.

Attentat de Lockerbie: une commission écossaise ouvre la voie à un procès en révision

Plus de huit ans après la mort du seul condamné dans l’affaire de l’attentat de Lockerbie, qui avait fait 270 morts en 1988, le dossier a franchi mercredi une étape décisive vers une possible réhabilitation posthume d’Abdelbaset Ali Mohamed Al Megrahi.

Saisie par la famille du Libyen, la Commission écossaise de révision des condamnations pénales (SRRC) a décidé de saisir la Haute cour de justice d’Edimbourg, a-t-elle annoncé dans un communiqué.

Il reviendra à cette dernière de décider ou non d’ordonner un procès en révision pour déterminer si Ali Mohmed Al Megrahi, qui a toujours clamé son innocence, a été victime d’une « erreur judiciaire », a expliqué Gérard Sinclair, directeur général de la SRRC, cité dans le communiqué.

Megrahi, agent des services de renseignement libyens, avait été condamné en 2001 à la prison à vie, avec un minimum de 27 ans derrière les barreaux, pour l’attentat à la bombe contre le Boeing 747 de la Pan Am. L’appareil, qui effectuait la liaison Londres-New York, avait explosé le 21 décembre 1988 au-dessus de Lockerbie, tuant 243 passagers, 16 membres d’équipage, ainsi que 11 habitants du village écossais.

Il s’agit de l’attentat le plus meurtrier sur le sol britannique.

L’explosion en vol de l’avion avait été provoquée par une bombe dissimulée dans un bagage enregistré en soute.

Un premier appel d’Abdelbaset Ali Mohamed al-Megrahi avait été rejeté en 2002. Une première fois saisie, la SCCRC avait estimé en 2007 qu’il devait pouvoir bénéficier d’un nouveau recours mais le condamné y avait renoncé en 2009.

Abdelbaset Ali Mohamed al-Megrahi avait été libéré en 2009 pour raisons médicales et est mort en 2012 à l’âge de 60 ans dans son pays, où il avait été accueilli en héros.

– Eléments « solides » –

Le régime de Mouammar Kadhafi avait reconnu officiellement sa responsabilité dans l’attentat, et a payé 2,7 milliards de dollars de dédommagement aux familles des victimes.

Dans sa décision rendue mercredi, la Commission a retenu deux des griefs exposés. D’une part le « verdict déraisonnable », car la Commission a souligné la faiblesse des preuves produites pour retenir la culpabilité de Megrahi.

D’autre part, elle a considéré que l’accusation aurait dû fournir à la défense un témoignage et un rapport de police, éléments qui l’ont privé « d’une véritable chance d’acquittement », selon la SRRC.

La Commission a également regretté le silence de l’accusation, lors du procès, sur la récompense versée par les autorités américaines à un témoin clé, le propriétaire du magasin où ont été achetés les objets qui se trouvaient dans la valise. Cela conforte sa conclusion que Megrahi a été « privé d’un procès équitable », a-t-elle expliqué.

Lors d’une conférence de presse à Glasgow, l’avocat de la famille Megrahi, Aamer Anwar a estimé ainsi disposer d’éléments « solides » pour un procès en révision. Si la justice décidait effectivement d’ordonner un tel réexamen, les premières audiences de procédure pourraient se tenir avant la fin de l’année et les audiences sur le fond du dossier l’année prochaine.

Il a rappelé que l’Iran avait depuis longtemps été désigné comme responsable de l’attentat, et que Megrahi avait été condamné à tort.

Mais l’Iran a démenti les accusations selon lesquelles il aurait décidé de l’attentat et financé un groupe armé palestinien en représailles à la mort de 290 passagers d’un avion d’Iran Air abattu par la marine américaine cinq mois plus tôt au-dessus du Golfe.

Cet Airbus de la compagnie nationale Iran Air avait été abattu peu après son décollage par deux missiles tirés de ce navire de guerre américain, l’équipage ayant affirmé avoir pris l’avion pour un avion de chasse iranien aux intentions hostiles.

Coronavirus : le risque de chaos se profile pour le sport

Après les huis clos et les reports, les équipes en quarantaine dans leur pays. Déjà touché de plein fouet par les restrictions liées à l’épidémie de nouveau coronavirus, le sport mondial voit se profiler le spectre du chaos, avec les difficultés de déplacement des joueurs eux-mêmes.

Le football européen commençait à peine à digérer les annonces de huis clos en pagaille pour limiter les déplacements de supporters qu’un nouveau problème est apparu mercredi à la veille des rencontres aller des 8e de finale de Ligue Europa.

Ainsi, l’AS Rome a annoncé qu’elle n’irait pas en Espagne pour son match contre le FC Séville, Madrid ayant interdit, du 11 au 25 mars, tous les vols en provenance d’Italie, pays européen le plus touché par l’épidémie du virus Covid-19, avec 631 décès sur plus de 4.300 morts.

De son côté, le président d’une autre équipe espagnole, Getafe, Angel Torres, a assuré que ses joueurs ne se rendraient pas en Italie pour affronter l’Inter Milan jeudi, toujours en Ligue Europa, de crainte de « pénétrer dans un foyer de coronavirus ». « Si nous devons perdre le match, nous le perdrons », avait même assuré mardi soir Angel Torres.

Mercredi après-midi, l’UEFA n’avait pas encore communiqué sur d’éventuelles reprogrammations, qui compliqueraient encore plus le calendrier italien. A Rome, le gouvernement a en effet annoncé la suspension de toutes les compétitions sportives, et donc de la Serie A, jusqu’au 3 avril. Or, le championnat italien ne pourra a priori pas empiéter sur l’été, car l’Euro-2020 doit commencer le 12 juin.

– pas d’escale à Moscou –

Trois autres rencontres de Ligue Europa, dont Linz-Manchester United, devaient se dérouler à huis clos jeudi, tout comme le choc de Ligue des champions entre le Paris SG et le Borussia Dortmund mercredi, les matches accueillant des spectateurs devenant l’exception, comme Glasgow Rangers-Bayer Leverkusen.

En France, la finale de la Coupe de la Ligue, PSG-Lyon, prévue le 4 avril, a été reportée au mois de mai, dans l’espoir d’éviter un huis clos au Stade de France.

Les restrictions de déplacement des équipes perturbent aussi les quarts de finale de l’Euroligue dames de basket-ball prévus mercredi. Le club de Montpellier a dû renoncer à se déplacer à Ekaterinbourg, en Russie, où il devait disputer le premier quart de finale de son histoire dans la compétition européenne reine, les joueuses ne pouvant faire escale à Moscou qui impose une période d’isolement de quatorze jours à toute personne provenant notamment de France. La Fiba devait encore statuer sur les conséquences sportives à en tirer, mais le problème risque de se poser à nouveau pour les joueuses de l’Asvel Lyon-Villeurbanne, qui ont rendez-vous à Orenbourg le 18 mars.

Chez les hommes, les prochaines rencontres des clubs italiens en Euroligue (Milan) et en Eurocoupe (Venise et Bologne) doivent être relocalisés.

– flamme sans public –

Alors que le Grand Prix moto d’Argentine, prévu du 17 au 19 avril, a été reporté mercredi du 20 au 22 novembre, soit la quatrième manche affectée d’une saison qui devait démarrer le 8 mars au Qatar pour toutes les catégories, de nouvelles inquiétudes ont rejoint mercredi la F1, qui doit inaugurer la sienne ce week-end en Australie.

Deux membres de l’écurie américaine Haas et un de la britannique McLaren se sont volontairement placés en isolement après avoir présenté des symptômes grippaux.

Le tennis continue aussi d’être touché : la Fédération internationale a annoncé mercredi le report, à une date encore à déterminer, de la phase finale de la Fed Cup initialement prévue mi-avril à Budapest.

Les reports, annulations et huis clos se multiplient à moins de cinq mois des Jeux Olympiques de Tokyo (24 juillet – 9 août), la plus grande manifestation sportive au monde, où sont attendus 11.000 athlètes et pour lesquels 4,5 millions de billets ont été vendus. Au Japon, le virus a contaminé 560 personnes, dont 12 sont mortes.

La ministre japonaise chargée des Jeux Olympiques a jugé mercredi « inconcevable » de reporter ou d’annuler les Jeux, même si un membre du comité d’organisation, Haruyuki Takahashi, a soulevé l’hypothèse selon le Wall Street Journal.

Pour la première fois en trois décennies, c’est sans spectateurs que la flamme olympique sera allumée, jeudi à Olympie en Grèce, berceau des Jeux antiques.

Pétrole: Saoudiens et Emiratis accentuent la pression, les prix replongent

L’Arabie saoudite et les Emirats arabes unis, deux alliés majeurs au sein de l’Opep, ont accentué la pression dans la guerre des prix pétroliers qu’ils livrent à la Russie, en annonçant qu’ils pourraient inonder les marchés mondiaux d’or noir, dont les cours replongeaient mercredi.

L’Arabie saoudite, chef de file de l’Organisation des pays exportateurs de pétrole (Opep), fait pression pour que la Russie — deuxième producteur mondial mais non membre de l’Opep — accepte une réduction de la production mondiale de brut afin de compenser une baisse de la demande provoquée par l’épidémie de nouveau coronavirus.

Depuis le refus la semaine dernière de Moscou, Ryad a procédé à la plus forte baisse de ses prix en 20 ans, s’efforçant de capter des parts de marché de Moscou et déclenchant un séisme sur les marchés financiers, qui affecte tout particulièrement la Russie.

Au lendemain d’un rebond sur les places boursières, le géant pétrolier Saudi Aramco a annoncé mercredi qu’il envisageait d’augmenter sa capacité de production de pétrole d’un million de barils par jour (bpj), pour la porter à 13 millions.

« Saudi Aramco annonce avoir reçu une directive du ministère de l’Energie visant à augmenter sa capacité maximale durable de 12 à 13 millions bpj », a déclaré l’entreprise publique dans un communiqué publié sur le site internet de la Bourse saoudienne.

Mardi, le premier exportateur mondial de brut avait déjà décidé d’augmenter sa production d’au moins 2,5 millions de bpj pour atteindre un niveau record de 12,3 millions bpj à partir d’avril.

Les cours ont encaissé lundi leur pire chute en près de 30 ans, en plongeant d’environ 25% avant de rebondir le lendemain. Mercredi, après l’annonce de Saudi Aramco, les cours du pétrole sont repartis à la baisse.

– « Un accord est essentiel » –

Mercredi, vers 08H22 GMT, le baril de « light sweet crude » (WTI), référence américaine du brut, pour livraison en avril, cédait 0,42 dollar, soit 1,22%, à 33,94 dollars, dans les échanges électroniques.

Le baril de Brent, référence européenne, pour mai, perdait de son côté 0,32 dollar, soit 0,86%, à 36,90 dollars.

De leurs côtés, les Emirats, quatrième producteur de l’Opep et proche alliés de Ryad dans le Golfe, se sont aussi dits prêts à augmenter leur production en pétrole de plus d’un million de baril par jour (bpj).

« Conformément à notre stratégie de croissance de la capacité de production (…), nous sommes en mesure d’approvisionner le marché avec quatre millions de barils par jour (bpj) en avril », a indiqué Abu Dhabi National Oil Company (Adnoc) dans un communiqué.

« Par ailleurs nous allons accélérer notre objectif de capacité à cinq millions bpj », a renchéri l’entreprise publique émiratie, qui produit jusque-là environ trois millions de bpj.

« Les opérateurs des Emirats disposent d’une capacité de production importante qui sera rapidement mise en service compte tenu des circonstances actuelles », a prévenu le ministre émirati de l’Energie, Souheil al-Mazrouei, sur Twitter.

Mais son pays est « convaincu qu’un nouvel accord (entre l’Opep et la Russie) est essentiel pour soutenir un marché équilibré et moins volatile », a-t-il ajouté.

– Russie « renforcée », selon Poutine –

Les annonces des Saoudiens et des Emiratis ne semblent toutefois pas avoir fait plier Moscou. Le président russe Vladimir Poutine s’est montré confiant lors d’une réunion avec des investisseurs, se disant « certain » que l’économie russe sortirait « renforcée ».

« Je suis certain que la Russie traversera cette période turbulente avec calme et dignité », a assuré le chef de l’Etat, déjà confronté en interne à d’énormes défis économiques et à une contestation contre sa révision constitutionnelle lui permettant de se maintenir au pouvoir après la fin de son mandat actuel.

Mardi, le ministre de l’Energie Alexandre Novak avait déclaré ne pas « fermer la porte » aux négociations avec les pays de l’Opep. Le récent désaccord de Moscou « ne signifie pas qu’à l’avenir nous ne pourrons plus coopérer », avait-il ajouté.

Le royaume saoudien affirme avoir une capacité de production de 12 millions de bpj, mais il reste difficile de savoir si ce rythme sera viable à long terme.

L’Arabie dispose également de dizaines de millions de barils de brut stockés dans des réserves stratégiques censées être utilisées en cas de besoin et pourrait s’en servir pour fournir les barils supplémentaires.

Coronavirus: des croisiéristes sur le Nil rapatriés d’Egypte

Vidé de ses touristes mercredi à Louxor, le bateau de croisière sur le Nil A-Sara, où 45 personnes ont récemment été testées positives au nouveau coronavirus, reste officiellement le principal foyer de Covid-19 en Egypte à ce jour.

Mercredi matin, le bateau de croisière à trois niveaux était toujours à quai à Louxor, ont constaté des journalistes de l’AFP. Amarré près de l’hôpital général de cette ville du sud de l’Egypte, le bateau se trouvait sous surveillance policière.

Non loin de là, le temple pharaonique de Louxor accueillait plusieurs groupes touristiques de diverses nationalités. Aucun touriste n’arborait de masque facial.

Sur une centaine de touristes à bord du bateau, 33 avaient été testés positifs en fin de semaine dernière, de même que 12 des quelque 70 membres d’équipage égyptiens. Les personnes testées « négatif » étaient restés confinées à bord.

Dans la nuit de mardi à mercredi, 46 touristes français et américains restés à bord ont été rapatriés, a indiqué le ministère du Tourisme égyptien.

– Soupçon sur l’Egypte –

« Ces étrangers ont quitté le gouvernorat de Louxor et ont été rapatriés (…) à la demande de leurs pays et en coordination avec l’OMS », a souligné mardi soir le ministère de la Santé.

Mercredi matin, 18 touristes indiens ont également été transférés à l’aéroport du Caire en vue de leur rapatriement, selon les autorités égyptiennes.

Au total, ils seraient donc 64 touristes étrangers au total à avoir été évacués d’Egypte.

Mais selon un communiqué du ministère du Tourisme publié à la mi-journée, il s’agirait de 63 touristes. Aucune source n’y était joignable mercredi pour expliquer cette différence.

« Tous les touristes à bord sont maintenant partis », a dit à l’AFP une source sécuritaire égyptienne sous couvert d’anonymat.

Par ailleurs, selon la même source, « les membres d’équipage égyptiens resteront à bord du bateau jusqu’à la fin de la période de 14 jours de quarantaine ».

Il n’a toutefois pas précisé le nombre de membres d’équipages concernés.

Si le bilan officiel actualisé mercredi après-midi, affichait 60 cas de coronavirus détectés en Egypte et une personne décédée –un touriste allemand de 60 ans– de nombreux soupçons pèsent sur la réalité des chiffres.

En effet, plusieurs pays dont la France, les Etats-Unis et le Liban ont signalé des cas de coronavirus sur des personnes ayant voyagé en Egypte.

Mercredi, un groupe de huit touristes de Hong Kong, ayant séjourné en Egypte du 27 février au 7 mars, ont été testés positif au nouveau coronavirus.

« Nous n’avons aucune idée de ce qui se passe en Egypte (…) Il faut encore déterminer pourquoi autant de membres du groupe touristique ont été infectés », a dit le Dr Chuang Shuk-kwan, chef du département des maladies contagieuses au Center for Health Protection à Hong Kong, lors d’un point presse télévisé quotidien.

L’un des ressortissants français qui se trouvaient à bord du A-Sara, Lucas Bonnamy, a confirmé qu’il avait été évacué dans la nuit de mardi à mercredi avec les autres ressortissants français et américains restés sur le bateau.

Toutefois, aucune source officielle française, ni américaine, n’avait confirmé en début d’après-midi mercredi les nationalités ou le nombre de touristes rapatriés.

– Stérilisation –

« Nous avons eu un retour en France », a confirmé M. Bonnamy dans un message à l’AFP avant de préciser que les touristes avaient reçu pour instruction de faire leur bagages vers 16H00 (14H00 GMT).

« Au bout d’une heure, après avoir patienté et signé des papiers, nous sommes partis (escortés) par la police jusqu’à l’aéroport de Louxor », avant d’être transférés au Caire puis à Paris.

Selon lui, les proches qui sont restés hospitalisés en Egypte « vont bien ». Trente-trois des touristes à bord du bateau, dont 14 français, ont été hospitalisés ce weekend.

Dans un message à l’un de ses proches, l’une des personnes hospitalisées a écrit: « C’est sale, on a deux repas froids par jour, on mange avec des fourchettes et nos doigts, pas de boissons chaudes et on doit rester dans nos chambres ».

Nicolas Gruwé, fils de l’un des rapatriés sollicité par l’AFP, pense que son père, âgé de 54 ans, sera confiné en quarantaine mais « n’en sait rien officiellement encore ».

Mardi soir, le ministère de la Santé a indiqué que 25 des 45 personnes testées positives au nouveau coronavirus sur le A-Sara avaient été testées négatives à la suite d’un second test.

Au Caire mercredi, le ministre de l’Aviation civile a assuré que des mesures de « stérilisation » avaient été prises dans « les différents aéroports » du pays. Et de son côté, Egyptair a annoncé également stériliser ses avions.

Coronavirus: des croisiéristes sur le Nil rapatriés d’Egypte

Vidé de ses touristes mercredi à Louxor, le bateau de croisière sur le Nil A-Sara, où 45 personnes ont récemment été testées positives au nouveau coronavirus, reste officiellement le principal foyer de Covid-19 en Egypte à ce jour.

Mercredi matin, le bateau de croisière à trois niveaux était toujours à quai à Louxor, ont constaté des journalistes de l’AFP. Amarré près de l’hôpital général de cette ville du sud de l’Egypte, le bateau se trouvait sous surveillance policière.

Non loin de là, le temple pharaonique de Louxor accueillait plusieurs groupes touristiques de diverses nationalités. Aucun touriste n’arborait de masque facial.

Sur une centaine de touristes à bord du bateau, 33 avaient été testés positifs en fin de semaine dernière, de même que 12 des quelque 70 membres d’équipage égyptiens. Les personnes testées « négatif » étaient restés confinées à bord.

Dans la nuit de mardi à mercredi, 46 touristes français et américains restés à bord ont été rapatriés, a indiqué le ministère du Tourisme égyptien.

– Soupçon sur l’Egypte –

« Ces étrangers ont quitté le gouvernorat de Louxor et ont été rapatriés (…) à la demande de leurs pays et en coordination avec l’OMS », a souligné mardi soir le ministère de la Santé.

Mercredi matin, 18 touristes indiens ont également été transférés à l’aéroport du Caire en vue de leur rapatriement, selon les autorités égyptiennes.

Au total, ils seraient donc 64 touristes étrangers au total à avoir été évacués d’Egypte.

Mais selon un communiqué du ministère du Tourisme publié à la mi-journée, il s’agirait de 63 touristes. Aucune source n’y était joignable mercredi pour expliquer cette différence.

« Tous les touristes à bord sont maintenant partis », a dit à l’AFP une source sécuritaire égyptienne sous couvert d’anonymat.

Par ailleurs, selon la même source, « les membres d’équipage égyptiens resteront à bord du bateau jusqu’à la fin de la période de 14 jours de quarantaine ».

Il n’a toutefois pas précisé le nombre de membres d’équipages concernés.

Si le bilan officiel actualisé mercredi après-midi, affichait 60 cas de coronavirus détectés en Egypte et une personne décédée –un touriste allemand de 60 ans– de nombreux soupçons pèsent sur la réalité des chiffres.

En effet, plusieurs pays dont la France, les Etats-Unis et le Liban ont signalé des cas de coronavirus sur des personnes ayant voyagé en Egypte.

Mercredi, un groupe de huit touristes de Hong Kong, ayant séjourné en Egypte du 27 février au 7 mars, ont été testés positif au nouveau coronavirus.

« Nous n’avons aucune idée de ce qui se passe en Egypte (…) Il faut encore déterminer pourquoi autant de membres du groupe touristique ont été infectés », a dit le Dr Chuang Shuk-kwan, chef du département des maladies contagieuses au Center for Health Protection à Hong Kong, lors d’un point presse télévisé quotidien.

L’un des ressortissants français qui se trouvaient à bord du A-Sara, Lucas Bonnamy, a confirmé qu’il avait été évacué dans la nuit de mardi à mercredi avec les autres ressortissants français et américains restés sur le bateau.

Toutefois, aucune source officielle française, ni américaine, n’avait confirmé en début d’après-midi mercredi les nationalités ou le nombre de touristes rapatriés.

– Stérilisation –

« Nous avons eu un retour en France », a confirmé M. Bonnamy dans un message à l’AFP avant de préciser que les touristes avaient reçu pour instruction de faire leur bagages vers 16H00 (14H00 GMT).

« Au bout d’une heure, après avoir patienté et signé des papiers, nous sommes partis (escortés) par la police jusqu’à l’aéroport de Louxor », avant d’être transférés au Caire puis à Paris.

Selon lui, les proches qui sont restés hospitalisés en Egypte « vont bien ». Trente-trois des touristes à bord du bateau, dont 14 français, ont été hospitalisés ce weekend.

Dans un message à l’un de ses proches, l’une des personnes hospitalisées a écrit: « C’est sale, on a deux repas froids par jour, on mange avec des fourchettes et nos doigts, pas de boissons chaudes et on doit rester dans nos chambres ».

Nicolas Gruwé, fils de l’un des rapatriés sollicité par l’AFP, pense que son père, âgé de 54 ans, sera confiné en quarantaine mais « n’en sait rien officiellement encore ».

Mardi soir, le ministère de la Santé a indiqué que 25 des 45 personnes testées positives au nouveau coronavirus sur le A-Sara avaient été testées négatives à la suite d’un second test.

Au Caire mercredi, le ministre de l’Aviation civile a assuré que des mesures de « stérilisation » avaient été prises dans « les différents aéroports » du pays. Et de son côté, Egyptair a annoncé également stériliser ses avions.

Coronavirus: l’Iran annonce 63 nouveaux décès, portant le total à 354 morts

L’Iran a annoncé mercredi la mort de 63 personnes supplémentaires infectées par le nouveau coronavirus, portant le total à 354 morts dans ce pays, l’un des plus touchés au monde.

« Malheureusement, au cours des dernières 24 heures, nous avons rapporté 63 décès et au total 354 personnes ont perdu la vie », a dit le porte-parole du ministère de la Santé, Kianouche Jahanpour.

Les autorités ont également recensé, selon M. Jahanpour, 958 nouveaux cas de contamination, portant à quelque 9.000 le nombre de personnes infectées en Iran.

La propagation du nouveau coronavirus est l’une des plus meurtrières en dehors de la Chine, où la maladie est apparue.

Téhéran, la capitale, a connu 256 nouveaux cas de contamination suivie par la province d’Ispahan (centre), avec 170.

L’Iran a annoncé son premier décès de coronavirus, dans la ville sainte chiite de Qom, le 19 février.

Il n’a pas encore imposé officiellement de quarantaines, mais les autorités ont appelé à plusieurs reprises les habitants à s’abstenir de voyager. Ils ont fermé des écoles et les universités et ont eu recours à la fermeture d’hôtels et d’autres logements touristiques pour décourager les voyages.

Dans ce contexte, le président Hassan Rohani a lancé mercredi un nouvel appel aux Iraniens, les invitant à limiter leurs mouvements afin de contenir le virus.

– 44 morts par intoxication –

« Les mouvements doivent être réduits au minimum », a déclaré M. Rohani lors d’une réunion du gouvernement, flanqué de ministres arborant tous un masque.

« Tout le monde doit être prudent afin que la propagation du virus puisse être contenue », a-t-il ajouté.

Le guide suprême, l’ayatollah Ali Khamenei, a annulé le discours qu’il tient chaque année à Machhad (nord-est de l’Iran) pour le Nouvel An persan, à cause du nouveau coronavirus, a annoncé lundi son bureau.

Outre les décès directs, 84 personnes sont mortes d’une intoxication au méthanol en Iran après des rumeurs selon lesquelles boire de l’alcool pouvait aider à guérir ou à protéger contre le virus.

Un dernier bilan sur ces intoxications faisait état mardi de 44 décès.

Dans certaines provinces comme le sud-ouest du Khouzestan, le nombre de décès dus à l’intoxication est plus élevé que celui du coronavirus.

Depuis l’apparition du nouveau coronavirus en décembre, 119.711 cas d’infection ont été recensés dans 110 pays et territoires, causant la mort de 4.351 personnes, selon un bilan établi par l’AFP à partir de sources officielles mercredi à 09H00 GMT.

La Chine continentale, où toutes les personnes arrivant de l’étranger à Pékin sont désormais placées 14 jours en quarantaine, dénombre 80.778 cas, dont 3.158 décès et 61.475 personnes aujourd’hui guéries.

Les pays les plus touchés après la Chine sont l’Italie (10.149 cas, 631 décès), l’Iran (9.000 cas, 354 décès), la Corée du Sud (7.755 cas, 60 décès) et la France (1.784 cas, 33 décès).

La gestion du nouveau coronavirus s’est par ailleurs invitée dans la polémique entre l’Iran et les Etats-Unis: face à la menace de cette épidémie, les Etats-Unis ont appelé mardi l’Iran à « libérer immédiatement » tous les ressortissants américains « injustement détenus ».

Téhéran a accusé pour sa part Washington de « prendre en otages des prisonniers iraniens » et s’est dit inquiet pour leur santé en raison de ce qu’il a appelé la mauvaise gestion par le président Donald Trump du nouveau coronavirus.

Algérie: Karim Tabbou, figure de la contestation, condamné à six mois de prison ferme

Karim Tabbou, une figure de proue du mouvement de contestation en Algérie, a été condamné mercredi à un an de prison dont six mois ferme, a indiqué à l’AFP Saïdi Salhi, vice-président de la Ligue algérienne des droits de l’Homme (LADDH).

« Il s’agit d’une condamnation, cela s’inscrit dans la logique de durcissement de la justice. Le verdict est lourd », a estimé M. Salhi, en précisant que M. Tabbou serait « libéré le 26 mars ».

Placé en détention une première fois le 12 septembre après avoir été inculpé « d’atteinte au moral de l’armée » par un tribunal de Tipaza, à l’ouest d’Alger, il avait été remis en liberté le 25 septembre. A nouveau arrêté dès le lendemain, il avait été inculpé cette fois d' »incitation à la violence » et une nouvelle fois incarcéré.

Chef d’un petit parti d’opposition non enregistré, l’Union démocratique et sociale (UDS), M. Tabbou, 46 ans, est « accusé d’incitation à la violence » et est en détention provisoire depuis fin septembre.

Plusieurs dizaines de personnes restent en détention dans le cadre du mouvement de contestation, selon les organisations de défense des droits humains, leur nombre précis étant difficile à établir en raison des remises en liberté et des interpellations qui se succèdent.

Après avoir obtenu la démission du président Abdelaziz Bouteflika en avril 2019, le « Hirak » exige le changement du « système » en place depuis l’indépendance en 1962.

Indépendante depuis 30 ans, la Lituanie lutte encore contre les traumatismes du passé

Fière d’avoir été, il y a trente ans, la première république soviétique à proclamer son indépendance, et d’avoir déclenché la désintégration de l’URSS, la Lituanie cherche toujours à dépasser les traumatismes du passé et à rendre justice aux victimes.

Auksute Ramanauskaite Skokauskiene a passé son enfance sous un autre nom pour éviter que les autorités soviétiques ne retrouvent son père qui a dirigé la résistance armée contre le régime communiste après la Seconde Guerre mondiale.

Capturé en 1956 et exécuté l’année suivante, Adolfas Ramanauskas n’a eu des obsèques nationales qu’en 2018, après que son corps avait été identifié dans une fosse commune.

« J’ai toujours été très troublée par le fait que les Soviétiques ont calomnié mon père et d’autres combattants pour la liberté. Pour moi, il était toujours très important que j’aie une tombe où je puisse me recueillir », a déclaré à l’AFP Ramanauskaite Skokauskiene, ancienne députée et ingénieure à la retraite.

Le retour à l’indépendance de la Lituanie de l’URSS le 11 mars 1990 a déclenché une année de troubles qui ont contribué à l’effondrement de l’Union soviétique en décembre 1991.

Alors que les Lituaniens ont depuis connu une croissance économique impressionnante, notamment après leur adhésion à l’UE et à l’OTAN en 2004, la nation balte de 2,8 millions de personnes est aux prises avec des taux de suicide, d’alcoolisme et d’émigration parmi les plus élevés d’Europe.

Certains critiques attribuent ces maux à la pauvreté et aux fortes disparités des revenus. Mais d’autres y voient également des symptômes d’un traumatisme intergénérationnel causé par un « passé non digéré ».

« Se pourrait-il que notre société soit malade et que le nom de la maladie ne soit pas coronavirus? L’une des raisons pour lesquelles les Lituaniens sont déprimés pourrait être notre histoire difficile et compliquée », a déclaré Laimonas Talat Kelpsa, haut responsable du ministère des Affaires étrangères lors d’une récente conférence à Vilnius ayant réuni psychothérapeutes et diplomates.

Des participants ont souligné que l’injustice historique et le fait d’ignorer les besoins des victimes ont un impact énorme sur les sociétés hantées par leur histoire.

Selon Simon Wessely, professeur de médecine psychologique au King’s College de Londres, reconnaître le passé est important à la fois pour l’individu et la collectivité.

« Parfois (le passé) est trop douloureux pour le reconnaître, mais il faut le faire », a déclaré Wessely.

– Histoire turbulente –

À l’instar des deux autres pays baltes, la Lettonie et l’Estonie, la Lituanie a été annexée par l’URSS pendant la Seconde Guerre mondiale, puis occupée par l’Allemagne nazie, reprise par l’URSS et enfin profondément marquée par les déportations de centaines de milliers de personnes en Sibérie et en Asie centrale dans les années 1940 et 1950.

Les trois pays sont restés sous la coupe de Moscou pendant des décennies. Puis des fissures sont apparues après l’arrivée de Mikhaïl Gorbatchev au Kremlin en 1985.

Le 11 mars 1990, les députés lituaniens, y compris les rebelles du Parti communiste, ont voté massivement pour l’indépendance.

Moscou ne l’a reconnue qu’après un coup d’État manqué des extrémistes communistes dans la capitale soviétique en août 1991.

L’URSS a été officiellement dissoute quatre mois plus tard.

Depuis, les États baltes entretiennent des relations difficiles avec Moscou. L’une des raisons sont des perceptions radicalement différentes de la Seconde Guerre mondiale et de l’époque soviétique.

En 2016, la Lituanie a déclaré un ancien responsable du KGB coupable de génocide pour son rôle dans l’arrestation d’Adolfas Ramanauskas. La Cour européenne des droits de l’homme l’a approuvé en appel.

L’année dernière, plus de 60 anciens responsables soviétiques ont été condamnés par contumace en Lituanie pour la répression en 1991 du mouvement indépendantiste ayant fait 14 morts et plus de 700 blessés.

La Russie refuse de reconnaître la prise de contrôle des États baltes par l’URSS comme une occupation.

La Lituanie n’a jamais obtenu ni excuses ni réparations.

– « La grande menace » –

La Lituanie et d’autres États d’Europe centrale autrefois dominés par les Soviétiques ont récemment critiqué la Russie pour ce qu’ils considèrent comme des tentatives de minimiser les crimes de l’époque communiste et de réécrire l’histoire à des fins politiques.

Le président lituanien Gitanas Nauseda considère la Russie comme la « plus grande menace à long terme » pour son pays et s’est engagé à « repousser toute tentative de fabriquer l’histoire ».

Mais la Lituanie a elle aussi été critiquée pour ne pas avoir suffisamment reconnu le rôle des collaborateurs locaux des nazis allemands à l’heure de l’Holocauste.

La reconnaissance des victimes et des bourreaux n’est qu’une première étape dans la guérison des traumatismes historiques, a dit Danute Gailiene, professeur de psychologie à l’Université de Vilnius.

« Nous ne pouvons pas dire que nous sommes une société saine et mature. Il y a un long chemin à parcourir, mais nous y sommes engagés », a-t-elle déclaré.

Biden loin devant, les démocrates attendent la décision de Sanders

Joe Biden voit se profiler un duel face à Donald Trump lors de la présidentielle américaine, mais le clan démocrate attend désormais avec fébrilité de savoir si son rival Bernie Sanders se retirera pour favoriser le rassemblement.

L’ancien vice-président de Barack Obama a remporté mardi lors des primaires une série de victoires convaincantes, dans le Mississippi, le Missouri, l’Idaho, mais surtout le Michigan, prise chargée en symboles.

Désormais archi-favori pour l’investiture, il pourrait, dans un scénario inimaginable il y a encore 15 jours, se retrouver bientôt seul en piste pour se préparer à affronter le milliardaire républicain le 3 novembre.

Mais « Bernie », qui a, comme il y a quatre ans, su électriser les foules autour de ses promesses d’assurance-maladie universelle et d’études gratuites, n’a pas encore dit un mot sur ses intentions.

Et les jours à venir s’annoncent périlleux pour le parti démocrate, hanté par le souvenir de 2016 où l’acrimonie entre ses équipes et celles d’Hillary Clinton lui avait coûté cher.

Bernie Sanders se retirera-t-il de la course avant le débat prévu dimanche pour amorcer un rapprochement? Joe Biden saura-t-il trouver les mots pour séduire les électeurs de Sanders – souvent jeunes – qui déplorent son manque d’audace ? Reprendra-t-il à son compte des mesures – fortes ou symboliques – mises en avant par le sénateur du Vermont ?

Pour Julian Zelizer, professeur d’histoire à l’université de Princeton, les deux septuagénaires devront faire un pas l’un vers l’autre.

« Oui, il sera crucial que Sanders mobilise sa base électorale derrière le candidat. Mais Biden devra faire un geste envers le mouvement enthousiaste de Sanders. Cela demandera des efforts réciproques », soulignait-il sur Twitter.

Certaines personnalités, telles que l’étoile montante démocrate Alexandria Ocasio-Cortez, soutien actif de « Bernie », pourraient jouer un rôle d’intermédiaire.

– Obama toujours silencieux –

« C’est plus qu’un +come-back+, selon moi », a affirmé Joe Biden mardi soir, « c’est un +come-back+ pour l’âme de la Nation », qu’il a promis de « restaurer » en l’emportant sur l’ancien homme d’affaires de New York.

Louant l' »énergie » et la « passion » des troupes du sénateur socialiste, il a tendu la main à ce dernier. « Nous avons le même but et ensemble, nous battrons Donald Trump, nous rassemblerons ce pays ».

L’ancien « VP » de Barack Obama a confirmé sa capacité à s’imposer très largement dans le Sud des Etats-Unis et auprès des Afro-Américains, un électorat-clé pour les démocrates.

Mais sa large avance dans un bastion industriel du Midwest comme le Michigan est aussi encourageante pour les démocrates qui espèrent s’y imposer en novembre face à Donald Trump pour retrouver la Maison Blanche.

Après plus de trente-cinq ans comme sénateur et huit ans comme bras droit de Barack Obama, « Joe », connu pour se gaffes à répétition et ses faux-pas, devra cependant faire taire les interrogations sur son état de santé. Car Donald Trump a déjà prévenu: il l’attaquera sans relâche sur ce thème.

Barack Obama reste, pour l’heure, très discret. Selon toute vraisemblance, il devrait attendre que sa famille politique ait désigné son champion pour sortir du bois et peser de tout son poids sur la prochaine échéance électorale.

Une autre inconnue pèse sur le long marathon électoral à venir: l’évolution de l’épidémie de coronavirus aux Etats-Unis.

Par mesure de précaution, Joe Biden et Bernie Sanders ont dû annuler leurs meetings prévus mardi soir dans l’Ohio.

L’équipe de Donald Trump, qui a jusqu’ici plutôt minimisé la menace, a de son côté annoncé un rassemblement le 19 mars dans le Wisconsin baptisé « Les catholiques avec Trump ».

Interrogé mardi sur ce thème, le vice-président Mike Pence est resté évasif: « Je suis convaincu que l’équipe de campagne prendra en compte toutes les informations disponibles et prendra les meilleures décisions possibles ».

De son côté, Anthony Fauci, directeur de l’Institut national des maladies infectieuses, a souligné combien il était impossible, face à une situation « qui évolue en permanence », de faire des recommandations pour les meetings de campagne des mois à venir.

Italie: la grande fuite des touristes

Ils sont les seuls touristes devant la majestueuse cathédrale de Florence: ce couple croulant sous les valises s’apprête à quitter l’Italie, où les mesures limitant sévèrement les déplacements ont accablé un secteur touristique déjà en berne.

« Tout est fermé, nous rentrons à la maison », soupire Alex Gross, un Allemand de 32 ans, pendant que sa fiancée vérifie nerveusement le statut de leur vol sur son portable. « Enfin, si notre vol n’est pas annulé! »

Beaucoup de vacanciers avaient déjà pris la poudre d’escampette au début de l’épidémie dans la péninsule, où le coronavirus a infecté à ce jour plus de 10.000 personnes et fait 631 morts, notamment dans le nord, son poumon économique.

Le ciel est bleu et le soleil brille des Alpes à la Sicile, mais les quelques touristes encore présents n’ont plus que deux options: rester dans leur hôtel et dévaliser le mini-bar, ou alors tout simplement rentrer chez eux.

« 90% de nos réservations ont été annulées », se désole Nicola, directeur d’un hôtel florentin qui n’a pas souhaité donner son nom de famille.

Du Colisée à la Tour de Pise, le gouvernement a fermé les portes de tous les musées et monuments, ordonné la fermeture des bars et restaurants dès 18H00, et demandé aux 60 millions de quitter leur domicile seulement cas de strict nécessité, et ce jusqu’au 3 avril.

– « Etrangement calme » –

Une flopée de compagnies aériennes ont décidé de suspendre leurs liaisons avec l’Italie, dont Air France, Ryanair, Easyjet et British Airways, et de nombreux pays ont imposé des restrictions de voyage.

« Je ne sais pas si on peut partir de Milan. Personne ne semble vraiment comprendre ce qui se passe », se lamente Nick Manager, un Texan au regard perdu errant autour de l’immense gare centrale de la capitale lombarde.

Fini les foules sur la place Saint-Pierre à Rome, le long des canaux à Venise ou sur le site archéologique de Pompéi près de Naples.

Un silence pesant règne sur la place romaine Campo de’ Fiori, qui bourdonne habituellement du matin au soir avec son marché en plein air et ses bars fréquentés par les étudiants étrangers.

Stefano Ruggiero, 48 ans, qui gère une parfumerie près du Ponte Vecchio à Florence, est sous le choc: « Jamais la rue n’a été aussi calme » depuis l’ouverture de son établissement en 1911, dit-il. « Même après la terrible inondation de 1966, quand la boue (déposée par les eaux débordant du fleuve Arno) avait tout dévasté, il y avait plus de gens ».

Les musiciens de rue ont eux aussi plié bagage: « C’est étrangement calme ».

Selon l’Association professionnelle des hôteliers italiens Federalberghi, les réservations ont chuté de 80% au niveau national, soit une perte évaluée à 2,5 milliards d’euros.

Et ce chiffre n’inclut pas les pertes enregistrées dans les autres maillons du secteur touristique, qui englobe aussi les transports, les restaurants et les commerces.

Représentant 13% du PIB, ce secteur emploie environ un million de personnes, qui craignent désormais pour leur emploi.

– Sacrifices –

Le gouvernement a débloqué des milliards d’euros pour affronter l’impact de l’épidémie sur l’économie, mais le Premier ministre Giuseppe Conte a annoncé ce week-end à ses compatriotes qu’ils devraient faire de gros sacrifices pour endiguer le virus et empêcher l’effondrement du système sanitaire italien.

Pour Nicola, le directeur d’hôtel de Florence, cela signifie que la plupart des hôtels vont être contraints de fermer, « bien qu’il soit possible qu’on demande à certaines grosses structures comme la nôtre de rester ouverts au cas où on leur demande de pallier le manque de lits dans les hôpitaux ».

Agostino Ferrara, 52 ans, propriétaire du restaurant Spada dans le centre de Florence, explique qu’il a été contraint de mettre une grande partie de son personnel en chômage technique face à la chute du nombre quotidien de couverts de 140 à 20.

« Je n’ai jamais vu une situation pareille », confie-t-il, entouré de son personnel désoeuvré.

« Je reste quand même optimiste, parce qu’on sait que les gens ont tendance à oublier les choses horribles », ajoute-t-il en souriant. « J’espère qu’on va s’en sortir et que dans quelques semaines, dans quelques mois, les touristes reviendront en Italie, encore plus nombreux qu’avant. »

Coronavirus: 46 touristes d’un bateau de croisière rapatriés d’Egypte

Quarante-six touristes français et américains, retenus depuis vendredi sur un bateau de croisière à Louxor (sud de l’Egypte) en raison de cas de coronavirus, ont été rapatriés dans la nuit de mardi à mercredi, a indiqué le ministère du Tourisme dans un communiqué.

« Un groupe de 46 touristes français et américains ont quitté le bateau de croisière (…) où 45 cas positifs avaient été annoncés » parmi la centaine de personnes qui se trouvaient à bord, selon la même source.

En outre, mercredi matin, 18 touristes indiens ont également été transférés à l’aéroport du Caire en vue de leur rapatriement, selon Abdel Fattah el-Assi, le président de l’autorité de surveillance des installations touristiques.

Il s’agirait des derniers ressortissants étrangers présents sur le « A-Sara », bateau de croisière immobilisé depuis la semaine dernière à Louxor en raison de contaminations au Covid-19.

« Ces étrangers ont quitté le gouvernorat de Louxor et ont été rapatriés (…) à la demande de leurs pays et en coordination avec l’OMS », a souligné mardi soir le ministère de la Santé dans un autre communiqué.

L’un des ressortissants français qui se trouvaient à bord du A-Sara, Lucas Bonnamy, a confirmé qu’il avait été évacué avec les autres ressortissants français et américains présents sur le bateau.

Toutefois, aucune source officielle française, ni américaine, ne confirmait mercredi matin les nationalités ou le nombre de touristes rapatriés.

« Nous avons eu un retour en France », a confirmé M. Bonnamy dans un message à l’AFP avant de préciser que les touristes avaient reçu pour instruction de faire leur bagages vers 16H00 (14H00 GMT).

« Au bout d’une heure, après avoir patienté et signé des papiers, nous sommes partis (escortés) par la police jusqu’à l’aéroport de Louxor », avant d’être transférés au Caire puis à Paris.

Selon lui, les proches qui sont restés hospitalisés en Egypte « vont bien ». Trentre-trois des touristes à bord du bateau dont 14 français ont été hospitalisés ce weekend.

Nicolas Gruwé, fils de l’un des rapatriés sollicité par l’AFP, pense que son père, âgé de 54 ans, sera confiné en quarantaine mais « n’en sait rien officiellement encore ».

Mardi soir, le ministère de la Santé a indiqué que 25 des 45 personnes testées positives au nouveau coronavirus sur le A-Sara avaient été testées négatives à la suite d’un second test.

Japon: commémorations modestes pour le tsunami de 2011

Le Japon a sobrement commémoré mercredi le souvenir du grand tsunami du 11 mars 2011 qui a aussi entraîné la catastrophe nucléaire de Fukushima, l’épidémie de coronavirus ayant conduit à l’annulation des principaux hommages publics dans le pays.

« C’est le moment de prendre toutes les précautions nécessaires pour éviter la propagation du virus sur notre sol », a déclaré le Premier ministre Shinzo Abe lors d’une petite cérémonie dans ses bureaux à Tokyo.

Le Premier ministre a aussi exprimé ses condoléances aux victimes et renouvelé sa promesse de poursuivre la reconstruction des régions touchées par le désastre, toujours sinistrées neuf ans après.

La télévision japonaise a montré des images de familles venues se recueillir mercredi dans plusieurs endroits de la préfecture de Miyagi, particulièrement touchée par la catastrophe, qui a fait au total environ 18.500 morts et disparus dans le nord-est du Japon.

Comme chaque année, le pays a observé une minute de silence à 14H46 (05H46 GMT). Le moment exact où, il y a neuf ans jour pour jour, un terrible séisme sous-marin de magnitude 9,0 a secoué l’archipel avant qu’un gigantesque raz-de-marée ne s’abatte sur les côtes nord-est du pays.

Sous une pluie fine au parc Hibiya, dans le centre de Tokyo, des passants, pour la plupart arborant des masques chirurgicaux, se sont rassemblés pour prier en silence devant un autel entouré de fleurs de cerisiers.

Naoya Matsuoka, employé dans une entreprise financière, a jugé important de braver le coronavirus pour venir rendre hommage aux victimes. « Nous sommes confrontés à de nombreux problèmes et nous entendons beaucoup d’incitations à ne pas maintenir d’événements, mais la catastrophe (du 11 mars 2011) est quelque chose que nous ne devons pas oublier, donc c’est pour cela que je suis là », a-t-il expliqué.

En raison du coronavirus, le gouvernement japonais a annulé cette année la grande cérémonie nationale qui avait lieu tous les ans à Tokyo depuis 2012 en présence du Premier ministre, de membres de la famille impériale, d’élus locaux, de diplomates et de proches de victimes.

Le tsunami a entraîné la plus grave catastrophe nucléaire depuis celle de Tchernobyl en avril 1986 en URSS.

L’accident de la centrale nucléaire de Fukushima a forcé 160.000 personnes à fuir la région, face aux radiations.

« Plus de 40.000 résidents n’ont toujours pas pu retrouver leur foyer », a rappelé mercredi dans un communiqué le gouverneur de la préfecture de Fukushima, Masao Uchibori, exhortant la population du pays à maintenir son soutien aux sinistrés.

« Derrière l’intérêt faiblissant et les rumeurs nocives, il y a des enfants qui continuent de vivre des moments douloureux, et des résidents qui souffrent de solitude », a-t-il souligné.

Si le démantèlement complet de la centrale nucléaire n’est pas attendu avant quatre décennies, l’Etat espère mettre en avant lors des Jeux olympiques de Tokyo cet été les efforts de reconstruction accomplis jusqu’à maintenant.

Le relais de la flamme olympique au Japon doit notamment démarrer symboliquement le 26 mars de la région de Fukushima.

En Libye, la guerre premier rempart contre le coronavirus ?

Faisant fi des appels des autorités sanitaires à éviter les rassemblements pour se prémunir contre le nouveau coronavirus, Moayed al-Missaoui suit dans un café bondé de la capitale libyenne un match du championnat italien de football retransmis à la télévision.

Comme lui, de nombreux Libyens estiment que le conflit qui déchire leur pays a au moins un aspect positif. Pour eux, la fermeture du seul aéroport international de Tripoli et les liens limités avec l’étranger à cause de la guerre les protège du Covid-19: si l’épidémie a touché les pays voisins, aucun cas n’a été rapporté à ce jour en Libye.

« Nous sommes à l’abri des virus en Libye, un pays dont la capitale est assiégée et dont les issues terrestres et aéroportuaires sont fermées », avance Moayed al-Missaoui.

Pour cet universitaire de Tripoli, les Libyens n’ont « rien à craindre », contrairement aux pays ayant des contacts permanents avec le reste du monde.

Lui et ses amis ont les yeux rivés sur l’écran pour suivre un match qui se joue en Italie dans un stade vide. On entend clairement à la télévision l’écho des coups de sifflet de l’arbitre et les cris des entraîneurs, tranchant avec la brouhaha dans le café.

Les matchs du championnat italien ont été chamboulés cette semaine par l’épidémie de nouveau coronavirus, qui a conduit les autorités italiennes à imposer un huis clos généralisé, dans un pays parmi les plus touchés au monde qui vit désormais sous cloche.

« Nos voisins italiens sont privés du plaisir d’assister au match dans les stades et même dans les cafés et les places publiques alors que c’est du pur plaisir pour nous », lance Moayed avec le sourire.

– Zéro cas –

Son voisin, Diya Abdel Karim, estime qu’il est plus « sensé » de gérer cette épidémie avec décontraction pour éviter la vague de panique qui règne dans les pays touchés.

« Il vaut mieux ne pas susciter la peur et la panique chez les gens pour que les autorités puissent appliquer des mesures sanitaires préventives sans pression », estime ce dentiste, soulignant toutefois qu' »il faut être vigilant ».

Jusqu’ici, les autorités libyennes affirment qu’aucun cas de contamination n’a été recensé, ce qui n’écarte pas l’existence de cas isolés non contrôlés, dans un pays en proie au chaos depuis des années.

« Grâce à Dieu, nous n’avons enregistré aucun cas », confirme à l’AFP Badreddine al-Najjar, président du Centre national de lutte contre les maladies (CNLM).

Le CNLM, une entité gouvernementale basée à Tripoli, prévoit toutefois des mesures préventives face à d’éventuelles contaminations provenant notamment des pays mitoyens de la Libye ayant enregistrés des cas de Covid-19.

« Le virus entoure la Libye de tous les côtés. (…) Il est nécessaire de surveiller ce danger transfrontalier », même si les déplacements vers et depuis la Libye sont limités, ajoute M. Najjar.

Tunisie, Algérie et Egypte ont annoncé cette semaine des cas de Covid-19, « mais on ne peut pas encore parler d’épidémie », souligne-t-il.

Quoi qu’il en soit, les autorités sanitaires se préparent, selon M. Najjar: « Dès la semaine prochaine, les cellules de quarantaine et d’isolement seront prêtes ».

– Rupture de stock –

Exemple de l’isolement de la Libye du reste du monde du fait des conflits armés et des violences qui secouent le pays depuis la chute en 2011 de Mouammar Kadhafi, aucun avion civil ne se pose actuellement dans la capitale.

Pour se rendre d’Europe à Tripoli, il faut aller à Tunis ou à Istanbul, puis prendre un vol pour Misrata et enchaîner sur un trajet de 200 km en voiture jusqu’à Tripoli, si les conditions de sécurité le permettent. Une autre option est une journée en voiture de Tunis jusqu’au poste-frontière Ras Jédir, avant d’enchaîner sur un trajet ardu de 150 km jusqu’à la capitale, durant lequel le coronavirus n’est pas la principale source d’insécurité.

Fin 2019, un journaliste de l’AFP a mis plus d’une semaine avant de pouvoir rejoindre Tripoli depuis une capitale européenne.

Mais certains Libyens craignent néanmoins de ne pas être à l’abri d’une contamination dont les effets seraient alors catastrophiques dans un pays où la guerre a tué des centaines de personnes et déplacé plus de 150.000 autres.

Alors ils prennent des précautions.

Cela a déjà entraîné des ruptures de stocks dans les pharmacies et les supermarchés pour certains produits.

« Les importations de gel hydroalcoolique, de masques et de gants ont nettement augmenté », précise à l’AFP Mounir el-Hazel, directeur d’une société d’importation de matériel médical.

« Commerçants, pharmaciens et particuliers, (…) se préparent à d’éventuelles pénuries », explique-t-il.

Et certains en profitent. Selon cet homme d’affaires, les prix de certains produits ont été multipliés par trois, voire six, par rapport au mois de décembre.

Russie: Poutine « pour toujours »? Soutiens et opposition se mobilisent

Les fidèles du Kremlin comme les opposants se mobilisaient mercredi après un nouveau coup de théâtre de Vladimir Poutine, qui a ouvert avec une réforme constitutionnelle la voie à son maintien à la présidence jusqu’en 2036.

Cet amendement à la loi fondamentale, ajouté mardi à la surprise générale à une réforme plus vaste, permettra à l’homme fort de Russie de « réinitialiser » son compteur de mandats présidentiels, afin de lui donner le droit de se représenter en 2024 mais aussi en 2030. La Cour constitutionnelle doit valider la manoeuvre, à la demande de M. Poutine.

Adoptée en troisième lecture mercredi par les députés, l’ensemble de la révision constitutionnelle, qui inclut aussi un renforcement des prérogatives présidentielles, des mesures sociales et des principes sociétaux conservateurs, doit être validé encore par la chambre haute du Parlement et un « vote populaire » le 22 avril.

Les alliés politiques du président se sont réjouis de la possibilité du maintien au pouvoir de M. Poutine, 67 ans, aux commandes de la Russie depuis 20 ans.

– Faire face aux ennemis –

Le loyal maire de Moscou, Sergueï Sobianine, a estimé ainsi qu’interdire à M. Poutine de se représenter en 2024, du fait de l’actuel limite à deux mandats consécutifs, était « un facteur déstabilisateur » pour le pays.

Il a fait valoir la « stabilité » du pouvoir face aux ennemis « intérieurs et extérieurs » de la Russie, qui « tentent de saper notre indépendance et notre économie ».

Le président de la chambre basse du Parlement, Viatcheslav Volodine, a estimé que la réforme « renforcera le pays ». La présidente de la chambre haute, Valentina Matvienko, a assuré elle que les élections de 2024 n’étaient pas pour autant « jouées d’avance ».

Du côté des détracteurs du pouvoir, cette mesure surprise prouve que M. Poutine a l’intention de rester indéfiniment au pouvoir, même s’il avait assuré le contraire par le passé.

Certains ont aussi dénoncé la décision mardi de Sergueï Sobianine de bannir les rassemblements de plus de 5.000 personnes, officiellement pour cause d’épidémie de coronavirus.

Cette annonce est cependant intervenue juste après que l’opposition a annoncé son intention de manifester courant mars contre M. Poutine à Moscou, théâtre cet été de vastes manifestations qui avaient été réprimées.

« 1) Vous annoncez que vous allez rester au pouvoir pour toujours. 2) L’opposition veut organiser des protestations. 3) Sous prétexte de lutte contre le coronavirus, vous interdisez les rassemblement à Moscou », a ironisé le populaire blogueur StalinGulag.

– Un « putsch » –

La figure de proue des opposants, Alexeï Navalny, a lui dénoncé une réforme qui permet à Poutine de briguer un mandat « comme si c’était la première fois ».

« Techniquement, ce qui se passe aujourd’hui est un putsch », a lâché son bras doit, Leonid Volkov.

Dès le vote en deuxième lecture mardi par les députés, une centaine de personnes s’étaient rassemblées près des murs du Kremlin pour protester contre l' »impensable ».

Une nouvelle action de protestation a commencé mercredi devant le Parlement.

Justifiant les amendements à la Constitution, M. Poutine a jugé mardi qu’un « pouvoir présidentiel fort est absolument nécessaire à la Russie » et estimé que la « stabilité (…) devait être prioritaire ».

Vladimir Poutine avait déjà pris tout le monde de court en janvier en annonçant qu’il voulait lancer une révision constitutionnelle, la première depuis l’adoption de la Constitution russe en 1993. Cette initiative avait immédiatement été considérée comme une manière de préparer l’après-2024.

La révision concerne à la fois le système politique, renforçant notamment les pouvoir de l’exécutif, mais donne aussi des droits socio-économiques tels qu’un salaire minimum garanti et une indexation des retraites.

Elle entérine aussi le virage conservateur de la Russie, dotant la loi fondamentale de la mention de « foi en Dieu », de la nécessité de politiques publiques natalistes ainsi que du principe d’un mariage possible uniquement entre un homme et une femme.

Séoul, l’élève modèle de la lutte contre le coronavirus?

Après avoir enregistré une flambée de contaminations, la Corée du Sud est parvenue à réduire de façon significative le nombre de nouveaux cas de Covid-19 tout en gardant, apparemment, un taux de létalité relativement bas.

Mercredi, Séoul totalisait 7.755 cas confirmés, ce qui fait d’elle le quatrième pays le plus touché. Mais le nombre de nouveaux cas s’est considérablement réduit, et seules 60 personnes sont mortes.

Cela fait-il de la Corée du Sud un modèle à suivre dans la lutte contre l’épidémie?

Comment Séoul a géré l’épidémie?

Contrairement à la Chine qui a choisi de cloîtrer une partie de sa population, Séoul a adopté une stratégie mêlant information du public, participation de la population et une campagne massive de dépistage.

Les proches de toutes les personnes contaminées sont ainsi recherchées de façon systématique, avant de se voir proposer un test de dépistage.

Les déplacements des malades avant qu’ils ne soient testés positifs sont reconstitués au travers des images de vidéosurveillance, de l’utilisation de leur carte bancaire ou du bornage de leur smartphone, puis rendus publics. Des sms sont même envoyés aux gens quand un nouveau cas est détecté près de chez eux ou de leur travail.

Cette stratégie a suscité des interrogations évidentes quant à la protection de la vie privée. Mais elle en a aussi poussé certains à se faire tester.

La Corée du Sud a réalisé davantage de dépistages qu’aucun autre pays, à un rythme d’environ 10.000 par jours, ce qui a permis de s’attaquer très tôt aux nouveaux foyers d’infection.

Comment Séoul a fait autant de tests?

Mercredi, le nombre total de tests effectués s’élevait à 220.000. Le pays compte 500 cliniques habilitées pour les réaliser, dont une quarantaine de cliniques ambulantes, afin de minimiser les contacts entre malades potentiels et travailleurs de la santé.

La Corée du Sud a en fait appris de ses propres erreurs et notamment de la carence de tests disponibles lors de la crise en 2015 du syndrome respiratoire du Moyen-Orient (Mers).

Alors elle a accéléré les procédures de mise sur le marché des tests, et quelques semaines après l’apparition du coronavirus en Chine, Séoul donnait son feu vert à la mise à disposition des cliniques d’un tout nouveau test diagnostiquant le Covid-19 en six heures.

Comment la population a réagi?

Les autorités ont lancé une campagne de « prise de distances sociales » en exhortant les gens à rester chez eux, à éviter les rassemblements et à minimiser les contacts. Conséquence: des quartiers d’ordinaires bondés se sont vidés, tandis que magasins et restaurants peinaient à attirer les clients.

Quantités d’événements sportifs ou culturels ont été annulés et le port du masque s’est généralisé, comme le préconisait le gouvernement, qui a pu compter sur une population particulièrement respectueuse des consignes.

Pourquoi la létalité est si basse?

Il est impossible de calculer aujourd’hui précisément le taux de létalité du Covid-19 qui ne pourra être affiné qu’après l’épidémie.

L’observation des chiffres transmis par les gouvernements donne cependant le sentiment d’une mortalité beaucoup plus faible en Corée du Sud qu’ailleurs.

Divers facteurs expliquent cette impression. La campagne de dépistage a permis une prise en charge précoce des malades. Son ampleur fait qu’il y a beaucoup plus de chances de repérer les malades ne présentant pas ou très peu de symptômes et qui ne seraient pas testés dans les autres pays. Repérer davantage de malades réduit mathématiquement la proportion de décès.

En outre, la population infectée au Sud a un profil unique, puisque la plupart des personnes contaminées sont des femmes, et près de la moitié ont moins de 40 ans.

Les autorités l’expliquent par le fait que plus de 60% des cas de contamination sont liés à l’Eglise Shincheonji de Jésus, une organisation religieuse souvent accusée d’être une secte. La plupart de ses membres sont des femmes, pour beaucoup âgées d’une vingtaine ou d’une trentaine d’années.

Or on sait que le taux de létalité du coronavirus augmente avec l’âge et les plus de 80 ans -et en particulier les hommes- sont les plus à risque.

La Corée du Sud, un exemple à suivre?

« Les tests sont une mesure initiale cruciale pour contrôler un virus », estime Masahiro Kami, de l’Institut pour la recherche sur les politiques médicales, basé à Tokyo. « C’est donc un bon modèle, pour tous les pays. »

La Corée du Sud a « agi vite et bien », abonde Marylouise McLaws, de l’Université de Nouvelle-Galles du Sud.

« C’est très dur pour les autorités de se résoudre à des mesures aussi fortes. Ce qui fait que c’est souvent fait de façon tardive. »

En Libye, la guerre premier rempart contre le coronavirus ?

Faisant fi des appels des autorités sanitaires à éviter les rassemblements pour se prémunir contre le nouveau coronavirus, Moayed al-Missaoui suit dans un café bondé de la capitale libyenne un match du championnat italien de football retransmis à la télévision.

Comme lui, de nombreux Libyens estiment que le conflit qui déchire leur pays a au moins un aspect positif. Pour eux, la fermeture du seul aéroport international de Tripoli et les liens limités avec l’étranger à cause de la guerre les protège du Covid-19: si l’épidémie a touché les pays voisins, aucun cas n’a été rapporté à ce jour en Libye.

« Nous sommes à l’abri des virus en Libye, un pays dont la capitale est assiégée et dont les issues terrestres et aéroportuaires sont fermées », avance Moayed al-Missaoui.

Pour cet universitaire de Tripoli, les Libyens n’ont « rien à craindre », contrairement aux pays ayant des contacts permanents avec le reste du monde.

Lui et ses amis ont les yeux rivés sur l’écran pour suivre un match qui se joue en Italie dans un stade vide. On entend clairement à la télévision l’écho des coups de sifflet de l’arbitre et les cris des entraîneurs, tranchant avec la brouhaha dans le café.

Les matchs du championnat italien ont été chamboulés cette semaine par l’épidémie de nouveau coronavirus, qui a conduit les autorités italiennes à imposer un huis clos généralisé, dans un pays parmi les plus touchés au monde qui vit désormais sous cloche.

« Nos voisins italiens sont privés du plaisir d’assister au match dans les stades et même dans les cafés et les places publiques alors que c’est du pur plaisir pour nous », lance Moayed avec le sourire.

– Zéro cas –

Son voisin, Diya Abdel Karim, estime qu’il est plus « sensé » de gérer cette épidémie avec décontraction pour éviter la vague de panique qui règne dans les pays touchés.

« Il vaut mieux ne pas susciter la peur et la panique chez les gens pour que les autorités puissent appliquer des mesures sanitaires préventives sans pression », estime ce dentiste, soulignant toutefois qu' »il faut être vigilant ».

Jusqu’ici, les autorités libyennes affirment qu’aucun cas de contamination n’a été recensé, ce qui n’écarte pas l’existence de cas isolés non contrôlés, dans un pays en proie au chaos depuis des années.

« Grâce à Dieu, nous n’avons enregistré aucun cas », confirme à l’AFP Badreddine al-Najjar, président du Centre national de lutte contre les maladies (CNLM).

Le CNLM, une entité gouvernementale basée à Tripoli, prévoit toutefois des mesures préventives face à d’éventuelles contaminations provenant notamment des pays mitoyens de la Libye ayant enregistrés des cas de Covid-19.

« Le virus entoure la Libye de tous les côtés. (…) Il est nécessaire de surveiller ce danger transfrontalier », même si les déplacements vers et depuis la Libye sont limités, ajoute M. Najjar.

Tunisie, Algérie et Egypte ont annoncé cette semaine des cas de Covid-19, « mais on ne peut pas encore parler d’épidémie », souligne-t-il.

Quoi qu’il en soit, les autorités sanitaires se préparent, selon M. Najjar: « Dès la semaine prochaine, les cellules de quarantaine et d’isolement seront prêtes ».

– Rupture de stock –

Exemple de l’isolement de la Libye du reste du monde du fait des conflits armés et des violences qui secouent le pays depuis la chute en 2011 de Mouammar Kadhafi, aucun avion civil ne se pose actuellement dans la capitale.

Pour se rendre d’Europe à Tripoli, il faut aller à Tunis ou à Istanbul, puis prendre un vol pour Misrata et enchaîner sur un trajet de 200 km en voiture jusqu’à Tripoli, si les conditions de sécurité le permettent. Une autre option est une journée en voiture de Tunis jusqu’au poste-frontière Ras Jédir, avant d’enchaîner sur un trajet ardu de 150 km jusqu’à la capitale, durant lequel le coronavirus n’est pas la principale source d’insécurité.

Fin 2019, un journaliste de l’AFP a mis plus d’une semaine avant de pouvoir rejoindre Tripoli depuis une capitale européenne.

Mais certains Libyens craignent néanmoins de ne pas être à l’abri d’une contamination dont les effets seraient alors catastrophiques dans un pays où la guerre a tué des centaines de personnes et déplacé plus de 150.000 autres.

Alors ils prennent des précautions.

Cela a déjà entraîné des ruptures de stocks dans les pharmacies et les supermarchés pour certains produits.

« Les importations de gel hydroalcoolique, de masques et de gants ont nettement augmenté », précise à l’AFP Mounir el-Hazel, directeur d’une société d’importation de matériel médical.

« Commerçants, pharmaciens et particuliers, (…) se préparent à d’éventuelles pénuries », explique-t-il.

Et certains en profitent. Selon cet homme d’affaires, les prix de certains produits ont été multipliés par trois, voire six, par rapport au mois de décembre.

Pour les Angolaises, la double peine du changement climatique

C’était la corvée qu’elle redoutait le plus. Chaque fois que sa mère lui ordonnait de chercher de l’eau pour arroser les récoltes familiales, là-haut dans les montagnes du sud de l’Angola, Tehandjila Quessale se raidissait imperceptiblement.

Quitter l’école. Trois heures de marche. Se glisser dans la file d’attente au point d’eau. Et puis attendre pour remplir son seau, souvent jusqu’à la nuit. Une épreuve.

Et pour Tehandjila, 16 ans, le plus dur restait encore à faire. Regagner son hameau des alentours de Lubango, la capitale de la province de Huila. « J’avais peur des attaques de garçons », se souvient l’adolescente. Au moins deux filles qu’elle connaît ont été violées au retour du puits.

Comme si la sécheresse qui fissure la terre et la faim qui serre les estomacs ne suffisaient pas, les femmes de la province de Huila vivent aussi dans la peur de l’agression.

Ces dernières semaines, les pluies torrentielles qui ont lessivé la campagne des alentours lui ont apporté un peu de répit. Tehandjila peut désormais trouver de l’eau à une source toute proche de la petite maison de pierres qu’elle partage avec sa mère et ses six frères et sœurs.

Mais la pluie a aussi détruit la récolte de la famille et fait ressurgir le spectre de la famine.

Elle menace aujourd’hui 45 millions de personnes dans toute l’Afrique australe, selon les dernières évaluations de l’ONU.

Dans la province de Huila, les égarements de la météo ont poussé la plupart des hommes hors de leurs villages pour aller chercher du travail à Lubango. Et laissé aux femmes la lourde responsabilité de nourrir les enfants.

« Le changement climatique a un impact considérable sur la vie des femmes », résume Florbela Fernandes, du Fonds des Nations unies pour la population (FNUAP).

– Hommes absents –

L’ONU estime qu’elles constituent jusqu’à 80% des bataillons des déplacés par le réchauffement de la planète.

« A chaque crise, on constate que les groupes déjà les plus vulnérables sont ceux qui souffrent le plus », poursuit la représentante du FNUAP en Angola, « ces situations les exposent encore plus à la violence et aux abus ».

Les ONG opérant dans la province de Huila ont recensé plusieurs cas de femmes ou jeunes filles contraintes à des relations sexuelles en échange d’argent ou de nourriture.

Les pressions de l’environnement ne sont pas seules en cause. « C’est aussi une question de culture », estime Florbela Fernandes, « dans la plupart des pays africains, ce sont les filles et les femmes qui assument l’essentiel du travail à la maison ».

Le père de Tehandjila a trouvé un emploi de gardien à Lubango, mais il n’en fait guère profiter sa famille.

« Quand il revient à la maison, il est confronté à la faim. Alors il fait ce qu’il veut et moi, je me débrouille », lâche son épouse Mousaka Fernanda, 47 ans, en désherbant, les pieds dans la boue, son petit lopin de maïs.

« Les enfants ne demandent rien à leur père », ajoute-t-elle, « c’est à leur mère qu’ils réclament de quoi manger ».

Et ce n’est pas une mince affaire. Depuis des années que la sécheresse frappe la région, Mousaka Fernanda s’en sort en troquant son « macau », une liqueur locale qu’elle fabrique avec du sorgho, contre un peu de nourriture. Un gros kilo de maïs pour deux coupes de « macau ».

De quoi calmer la faim de la famille quelques jours seulement.

– Bouches à nourrir –

Alors quand sa fille aînée, Domingas, a appris qu’elle était enceinte, sa mère l’a pressée d’épouser le père de son enfant pour aller vivre avec lui.

« Ma mère ne voulait pas d’une bouche en plus à nourrir », explique la jeune femme de 19 ans, « moi j’étais contre ».

Le compagnon de Domingas Quessala a depuis quitté le foyer pour prendre un emploi dans la fabrique de jus de fruits de la ville voisine de Humpata. Désormais seule, la jeune maman confie elle aussi subir le harcèlement et les « agressions » des garçons pendant ses corvées d’eau.

« Les filles sont les premières victimes des séparations familiales », constate Anaina Lourenço, de l’ONG World Vision International. « Elles finissent par être obligées d’aider leurs mères et, très souvent, arrêtent leurs études ».

Dans un petit village de l’autre côté de la vallée, Cristina Canaino, 14 ans, a ainsi déserté les bancs de son école en 2018, lorsque son père a quitté sa famille de cinq enfants.

« Il est parti à la ville chercher du travail à cause de la sécheresse », raconte son épouse Ceu Jacinta, 32 ans, « on ne l’a pas revu depuis ». Elle n’a eu d’autre choix que de faire travailler sa fille Cristina dans un champ pour une poignée de kwanzas.

Ici aussi, les pluies ont récemment détruit une partie des récoltes de la famille et le ciel ne semble pas vouloir s’éclaircir. « S’il continue à pleuvoir, on ne pourra même pas ramasser un peu de maïs », redoute Ceu Jacinta.

Comble d’infortune, l’humidité a fait s’écrouler le toit de chaume de leur hutte. « Si mon mari était resté là », se lamente la cheffe de famille, « je ne pense pas que tout ça serait arrivé ».

Israël: Gantz va être placé sous protection rapprochée après des menaces

Benny Gantz, le principal rival du Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu, va être placé sous protection rapprochée de l’Etat à la suite de menaces sur internet, a annoncé le Shin Beth, le service de sécurité intérieure.

« Le Premier ministre a approuvé la recommandation du Shin Beth d’assurer une protection rapprochée de M. Gantz », a indiqué mardi le service de sécurité.

Cette décision doit encore être entérinée par une commission sécuritaire indépendante.

La protection de M. Gantz, chef du parti centriste « Bleu-Blanc », est jusque-là assurée par le service de sécurité du Parlement et avait déjà été renforcée après qu’il eut été insulté et menacé pour avoir dit vouloir former un gouvernement avec le soutien des partis arabes israéliens.

M. Gantz a relayé samedi sur Twitter un message disant qu’il devait « être assassiné comme Rabin », en référence à l’assassinat du Premier ministre travailliste Yitzhak Rabin en 1995 par un extrémiste juif, après une campagne haineuse contre lui d’une partie de la droite israélienne, alors menée par M. Netanyahu.

Benjamin « Netanyahu, arrête cette incitation à la violence, ne dis pas que tu n’étais pas au courant » des menaces en ligne, a commenté M. Gantz sur Twitter.

En Israël, seules sept personnes, dont le chef de l’opposition, reçoivent automatiquement la protection du Shin Beth.

M. Gantz, dont le parti est arrivé deuxième aux législatives du 2 mars après le Likoud (droite) de M. Netanyahu, n’est pas chef de l’opposition car ce titre ne peut être attribué qu’après la formation d’un gouvernement.

Or, Israël est dirigé par un gouvernement de transition depuis plus d’un an, deux précédents scrutins n’ayant pas abouti à la formation d’un cabinet.

MM. Gantz et Netanyahu mènent actuellement des tractations pour tenter de rallier des députés à leurs blocs car ni l’un ni l’autre n’est parvenu à obtenir l’appui de 61 parlementaires, seuil requis pour la formation d’un gouvernement.

« Tout maintenant est mort ici »: la frustration des habitants à la frontière gréco-turque

Dans son champ d’abricotiers en fleurs, à quelques encablures de la frontière gréco-turque, Dimitris Boudikas se désole de la fermeture du poste frontalier de Kastanies, qui a mis un terme aux va-et-vient constants avec Edirne, attraction locale en Turquie voisine.

« C’est la première fois depuis des décennies que Kastanies ferme. Je crains que ça dure des mois », déplore ce septuagénaire, qui souligne « l’amitié » entre Edirne et Kastanies, à 7 km l’une de l’autre, de part et d’autre de la frontière.

Pour faire pression sur l’Europe dans le conflit en Syrie, la Turquie a décidé fin février d’ouvrir ses portes au passage des migrants, malgré la déclaration de 2016 entre Ankara et Bruxelles, qui avait endigué les flux migratoires.

Première victime de la politique d’Ankara, le village de Kastanies, dont le poste frontière (Pazarkule côté turc) a fermé, théâtre récemment d’incidents violents impliquant les forces policières turques et grecques ainsi que les milliers de migrants piégés.

A 500 mètres du verger de Dimitris Boudikas, la clôture et les barbelés du poste-frontière. A l’horizon, on aperçoit le minaret de la mosquée de la ville d’Edirne (Adrianoupolis en grec), qui attire habituellement des centaines de Grecs frontaliers avides de ses produits bon marché.

« Nous avions l’habitude d’y aller tout le temps, il y a un grand marché, j’avais des collègues jardiniers turcs, c’était notre quotidien », raconte Apostolos Lymperidis, qui tient une pépinière, en face de la ferme de Boudikas.

Sur la place du village de Kastanies, Mary Rossi, propriétaire d’un café, les yeux rivés sur le téléviseur, suit les nouvelles.

« La situation est grave, je ne crois pas que le problème va se régler rapidement », estime celle qui répond aux nombreux médias locaux et étrangers venus couvrir les incidents à la frontière.

Les Turcs d’Edirne « venaient ici pour boire ou manger, nous avions l’habitude d’aller souvent en face pour faire des courses, maintenant que la douane est fermée, tout est mort ici », déplore-t-elle.

Une théière orientale en bronze orne le comptoir de son café, « le cadeau d’une femme turque venue récemment visiter Kastanies avec sa famille », explique-t-elle.

– Cible « facile » –

A l’extrémité du nord-ouest de la Grèce, Kastanies, qui compte 600 habitants, reste l’un des villages les plus isolés du département frontalier d’Evros, bordé par le fleuve éponyme.

Du côté grec, seul centre urbain à attirer les villageois, la ville d’Orestiada de 18.000 habitants se trouve à 18 km.

Plus au sud, Kipi, le second poste frontalier entre la Grèce et la Turquie, est pourtant resté ouvert depuis le début de la crise. Pour Athènes, les migrants étaient « poussés » vers Kastanies par la Turquie.

Pour Dimitris Boudikas, c’était plus « facile pour la Turquie d’inciter les migrants à venir aux portes de Kastanies », car la fermeture de Kipi ou du poste-frontière turc avec la Bulgarie, « passages habituels des camions routiers, aurait causé l’écroulement du commerce turc » avec l’Europe.

Compte tenu des bonnes relations entre Ankara et Sofia, la Grèce, qui a des relations historiquement délicates avec la Turquie voisine, apparaît pour beaucoup comme une cible facile pour Ankara pour faire pression sur Bruxelles.

Il y a toujours eu des groupes de migrants qui traversaient la frontière et n’étaient que « de passage de Kastanies, à destination de Thessalonique (métropole du nord de la Grèce) puis d’Athènes pour aller ensuite en France ou en Allemagne », raconte Mary Rossi.

Dimitris Boudikas se rappelle d’une dizaine de personnes noyées dans le fleuve Evros il y a quelques années « en tentant de le traverser ».

Mais maintenant, la situation « est plus dangereuse », renchérit Mary Rossi. « On dit qu’il y a des milliers de migrants qui attendent de passer et on ne peut pas y faire face ».

Mais la commerçante dit se sentir « en sécurité »: « Heureusement, il y a plein de policiers et de militaires envoyés pour sécuriser les frontières ».